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Comme un semblant d'ordinaire (7)

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Comme un semblant d'ordinaire (7) Empty Comme un semblant d'ordinaire (7)

Message  Epiphyte Lun 8 Fév - 20:59

Peut-être faudrait-il plus de recul pour oser parler de soi.
Je me souviens Rousseau et ses confessions, qu’il entreprit plutôt tardivement, comme si la prescription jouait un rôle majeur dans ses choix, alors que s’il avait vécu à notre époque il aurait compris en discutant avec Polanski que certains concepts ne sont pas applicables à tous les êtres humains. Peu importe finalement le temps qui passe, on finit toujours par payer ses actes, un jour ou l’autre.
Si je croyais un peu, je l’arborerais fièrement à bout de fanatisme péremptoire.
Si je pensais y échapper, je le tairais probablement.
Si je n’avais tant de rancune pour tous ces êtres insignifiants qui, malgré tout, ont sans cesse nourri ma misanthropie, je l’oublierais sans doute.
Et je n’arbore que souvenirs amers, taisant le plus profond de moi, j’oublie ce qui fut nécessaire.

Peut-être faudrait-il plus de recul pour agencer correctement l’écrit, comme le font les nègres des nantis, à coups de racolages gratuits, à coups d’oublis convenus, encore une fois avec le temps…
Tout revient.

Mais s’il faut s’écrire vraiment, un peu de chaos ne peut qu’adoucir le fond en y noyant la forme. Votre esprit ne vous dicte-t-il que des instants parfaits ? Vos nuits ne vous offrent-elles que des rêves sans cauchemars et des sommeils sans fin ?
Naturellement, non.
La chronologie ne se respecte jamais autant que le souvenir lui-même, et nos esprits obséquieux sont des lacs où se noyer n’aura jamais autant de saveur que périr aux océans du cœur.

Je mentionne Rousseau avec tendresse, lui qui m’ouvrit sans le savoir, et sans même l’avoir pressenti, un regard nouveau sur la littérature indigeste. A cette époque, où j’assumais difficilement une adolescence boutonneuse aux bancs du lycée, Rousseau me tomba sur le coin de la figure comme une obligation sincère, dans ma petite liste de textes à préparer pour l’oral de français du baccalauréat, il fut l’omniscience acquise de mes travers désabusés.
De tous les auteurs obligés, ce fut celui qui me parla le plus, et si je fais allusion aux indigestions, c’est probablement parce qu’on n’écoute jamais mieux que personne quelqu’un qui vous ressemble.
J’ai aimé Rousseau et ses confessions, et j’ai aimé découvrir qu’on pouvait ainsi se mettre en scène sans pudeur, sans aigreur masquée, sans fierté, sans doute… j’ai aimé le lire et inconsciemment me sentir moins malheureux en le lisant.
Depuis Rousseau, seul Houellebecq est parvenu à retentir autant en moi.
Mais je ne relirai plus Rousseau, le temps de l’adolescence et des mièvreries versifiées est loin derrière moi à présent, j’ai mon propre ruban rose à moi que je ne dirai qu’à l’âge des confessions intimes, celles qu’on dévoile souvent trop tôt aux émissions de Mireille Dumas sitôt qu’un vent de reconnaissance vient caresser votre indigence.
Rousseau aurait été bien dans un loft.
Houellebecq nous raconte le sien.
Et nous changeons au fil du temps, mais les souvenirs s’entassent, finissent par se bousculer, se terrassent les uns les autres à force d’humanité forcée, puis s’entèrent aux cimetières des mots oubliés.

Je conseille Rousseau comme journal intime des adolescents qui ne savent pas écrire, on le lit et on l’oublie, comme tout équipage d’avion moderne affable par commodité, on le lit et on l’oublie, même si mon examinateur choisit cette année-là dans la liste l’un de ses textes, qui me permit de m’en sortir de façon très honorable pour un scientifique.
Vous aurez beau, toute votre vie, passer des examens bercés par l’enthousiasme de l’impartialité contagieuse, vous ne serez jamais confrontés qu’à des êtres humains dont la subjectivité ne fait qu’égaler le pragmatisme. Réussir sa vie, pour ces gens-là, dont nous sommes, ne vous méprenez pas ; réussir sa vie c’est avant tout faire perdurer la colle au dos des étiquettes que l’on vous associe précocement.
Un oral n’a jamais été, et ne sera jamais un examen anonyme, avec la gueule du scientifique, les horizons les plus sceptiques vous sont offerts. Rousseau me donna quelques points d’avance, je dois bien le reconnaître, et si je le garde en mon cœur c’est vraisemblablement pour ça.

Avec le peu de recul que j’ai finalement sur les événements, j’ose malgré tout parler de cela, comme il le fit lui-même, et si je suis revenu plus haut à la période du collège que j’avais dans un premier temps écartée volontairement du flot inconsistant de mes souvenirs, c’est parce que finalement, ne vous en déplaise, tous les éléments sont liés dans une existence.
Loin de moi l’idée de vous parler du destin, je respecte les nécessités de chacun, je respecte les croyants et les athées, je respecte finalement depuis toujours ceux que je haïs pour éviter de me les mettre à dos, comme quoi la misanthropie singulière semble finalement moins belliqueuse que l’humanisme collectif ; mais tout en respectant chacun je préfère vous parler de rien.
Le destin est un concept nécessaire, comme Dieu, avec ou sans majuscule, comme l’astrologie, la météorologie, la politique ou tout sujet susceptible d’échauffer les esprits communautaires dans une soirée qui battrait de l’aile.
Ainsi, de ces sujets, nous construisons un quotidien moins fade.
Et pourtant, avec le temps, diraient les morts…
Oui, je sais, ça s’en va et ça revient, c’est fait de tous petits riens, ça se chante et ça se pleure aux téléphones des plus insipides artistes que La Terre ait portés. Depuis Claude François, seul Marc Levy, peut-être, a pu atteindre un tel degré de niaiserie au cœur d’un si grand nombre de français.
En même temps, je reconnais qu’on n’écrit pas My Way pour rien, il y a des niaiseries qui rapportent plus que d’autres.
Les miennes sont trop inaccessibles, c’est ce qu’un alpiniste en mal d’humour me sortit un jour au sortir d’un carambar escarpé que sont esprit refusait à gravir… mais non, je déconne !

Pour en revenir au sujet, puisque je digresse sans cesse et que vous ne faites rien pour m’en empêcher, bande d’ingrats, je suis revenu malgré moi à la période du collège par un souvenir d’armée ; tout est lié, vous disais-je avant de m’interrompre grossièrement.
Le froid est une sensation civile.
Quand vous devenez militaire, même par obligation, cela inclut forcément de ne plus être civil, et même si vous n’en avez que vaguement conscience, cela vous est craché le plus souvent possible pour éviter de l’oublier.
De ce fait, on ne met pas ses mains dans les poches, quand on est militaire.

A l’armée, nous étions réveillés vers cinq heures du matin.
Mais parfois, par jeu que seul un esprit militaire, même reclus au fond des poches, pourrait apprécier, il nous fallait sortir de la couche bien plus tôt, pour se réunir au garde-à-vous dans la cour, dans la tenue choisie par l’aspirant.
Dans ces cas-là, l’un de nous devait promptement gagner la cour pour visualiser ladite tenue et la communiquer à l’ensemble de la section, pour qu’aucun de nous ne puisse inconsciemment déroger à la règle.
Une section c’est un seul homme, cela aussi fait partie des leitmotivs au langage militaire, j’y reviendrais probablement plus tard quand me viendra l’envie de dire du mal à propos d’individus que je ne croiserai plus jamais, mais qui contribuèrent beaucoup au calvaire de ces quelques mois d’existence bâclée.
Toujours est-t-il que pour l’heure, certes matinale, nous nous sommes retrouvés dans la cour au garde-à-vous en survêtements bleus et baskets, l’une des tenues les moins pénibles du stage, puisqu’on l’appelle ainsi, mais avec l’interdiction toujours réelle de glisser ses mains dans les poches en couverture du froid.

Au collège, j’avais appris à ne surtout jamais enlever les mains des poches les jours de sport. Une journée entière à traverser la cour de récréation en survêtement, probablement rose ou vert à l’époque, vous exposait naturellement aux blagues les plus potaches dont le retroussement de pantalon jusqu’aux chevilles, et si ça fait rire les plus grands, ça n’offre jamais que les premières hontes aux plus petits qui découvrent enfin le monde tel qu’il est.
L’armée m’ôta l’envie de mettre les mains dans mes poches, elle m’en ôta surtout le loisir, comme elle m’ôta toute liberté tandis que je fus appelé à elle.
Je vis maintenant ma liberté civile en y mélangeant mes souvenirs, et nul ne pourra jamais me le reprocher, ou m’éveiller à n’importe quelle heure de la nuit pour vérifier que je m’y plie bien.
Je ne plie pas, je romps.
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Message  Nilo Jeu 6 Mai - 16:45

Encore un sauvetage grâce au Missing de Dédé.
Ce n'est pas parce qu'Epiphyte ne vient plus chez nous que ce texte doit rester dans l'oubli.

Nilo, ne pas faire semblant.

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Message  Nilo Dim 10 Avr - 16:36

Bientôt un an et pas un passage...
Heureusement que Le Printemps de la Prose vient au secours de ce vrai semblant.

Nilo, c'est pas faux.

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Message  sasvata Dim 10 Avr - 16:50

C'est vrai que je ne l'ai pas beaucoup lu ici... Fut un temps, pourtant...
J'ai apprécié retrouver sa plume. Il a une fluidité dans la réflexion, pourtant construite, qui me plait.
Et nous ramener à Rousseau... l'école n'a pas beaucoup d'imagination, il faut croire, puisque quelques années après Epi, j'y avais droit aussi. Et il a bien raison, on le lit, on l'apprécie sans doute, et puis on l'oublie. Rousseau, cependant, n'a pas eu de raisonnance particulière en moi je dois dire...
Et c'est assez drôle de se replonger dans les années collège je dois dire... D'autant que là, c'est si bien fait! ^^

Sasvata, j'en suis pas nostalgique Smile
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