A l'envers des buvards des pages qui s'effacent

A l'envers des buvards des pages qui s'effacent


Une plume affûtée sur le fil du rasoir
Se dresse pour saigner les veines de ces mots
Qui ont longtemps baigné au formol des labos
Avant que de sécher, mêlés à l'encre noire.

Un poème se meurt des larmes imparfaites
Mouillant les parchemins en ne laissant de traces
Qu'à l'envers des buvards des pages qui s'effacent
En donnant à l'ennui tout son goût de défaite.

Ecrire, ce n'est pas poser sur du papier
Des bâtons majuscules enrubannés de signes,
Ni injurier les rimes en mettant à la ligne
Des lettres assemblées pleines de déliés.

Cette plume qui tremble, absente et dérisoire,
D'avoir des lendemains qui chantent l'émotion
De ces veilles noircies à la suie des passions,
Du manque de sommeil coloré d'idées noires.

Cette plume qui danse au fil de ce rasoir
Epuise ses envies de tuer l'impatience,
Elle prend tout le temps de se croire en vacances
Et paye son écot au passeur de mémoire.


Nilo.

eh oui....
écrire, c'est être humain; se jeter dans les gouffres, sans calcul sans filet, comme on jouit, comme on souffre. Communier dans la rage, dans l'absolue douceur, parce qu'il y a toujours l'autre, parce qu'on est toujours seul...

Vivant, mémoire de passoire

Ce passage:

"Un poème se meurt des larmes imparfaites
Mouillant les parchemins en ne laissant de traces
Qu'à l'envers des buvards des pages qui s'effacent
En donnant à l'ennui tout son goût de défaite."

est très fort et appuie bien solidement le reste du poème.

L'ensemble est fort bien travaillé et il est clair qu'entre la maitrise et le fond, seul un auteur de haut niveau peut arriver à ce résultat avec "peu" de mots si je puis dire.

Le titre a une grande importance et l'image s'est faite immédiatement dans ma tête d'autant que j'ai du faire ( vu que j'écris beaucoup à la plume) je ne sais combien de magasins pour arriver à trouver un papier buvard.
Une autre image m'a aussi frappée, toujours avec le titre. j'ai comparé le papier buvard à nos pensées car en effet, peu importe la couleur, le buvard va les rendre absorbée comme les écrits que l'on posera .

Sylvie

Sylvie

Sylvie

Les larmes imparfaites, la fragilité des écrits et de leur auteur...tout cela me touche.
Reste au lecteur la tâche de déchiffrer au miroir de sa sensibilité propre les traces absorbées par le buvard de sa conscience.

Que j’aime ça ! Un autre Nilo…en arrêt et se tournant vers l’écriture, cette essence da la vie de nous tous, ici réunis.. Ce n’est pas souvent que tu écris ainsi, toi, un voyageur au-delà de notre vieux continent.
« Une plume affûtée sur le fil du rasoir » s’exprime aisément dans un poème à lire et relire par nous tous .
Cordialement Solweig

Superbe Nilo ! La deuxième strophe est exquise : En donnant à l'ennui tout son goût de défaite. Exact !

Je suis en vacances mais je me devais de passer ici pour vous remercier.

Nilo, Paris fin octobre.

comme un credo...

C'est beau

J'achèterai un buvard un jour, pour lire ton poème sans la moindre écorchure.

Le plaisir constant de te lire, qui plus est en alexandrin. L'amour que j'ai pour ce vers plus ta maîtrise des mots et ta sensibilité donne toujours un beau mélange.

Z.

Je dois parfois oublier de faire "envoyer" tant je suis étourdie !

Il est impossible que je ne sois pas passée sur ce texte verser une larme ou deux !

H.

Il était temps que je rentre...
L'encre sèche et s'estompe.
Ne restent que les mots.

Nilo, merci.

Les vôtres ne s'effaceront pas !

H.

Encre indélébile, on peut bien le dire.

Très joli texte- et un titre merveilleux.