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Jacques Rigaut
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Jacques Rigaut
Un petit cousin désespéré de Jarry. Des trois suicidés de la société - Cravan, Vaché et lui - il est le seul a s'être réellement suicidé. D'une balle en plein coeur. Il a écrit très peu choses finalement, regroupées et publiées chez Gallimard en 1970 par le spécialiste américain Martin Kay, sous le titre Ecrits. Jean-Luc Bitton est en train d'écrire sa biographie. Il consacre à ce travail un blog passionnant où il raconte à qui veut bien le lire son travail de biographe depuis le début de ses recherches : http://rigaut.blogspot.com/ . La première partie (2005-2008) est fabuleuse, Bitton révélant au fur et à mesure ses découvertes : photos inédites en veux-tu en voilà, carnet militaire, élucidations d'énigmes rigaldiennes, lettres inédites, voyages sur les pas de Lord Patchogue. De toutes ses trouvailles, Bitton a publié dans la Nouvelle Revue Française (n° 571) une série de lettres de Rigaut à son protecteur, le peintre Jacques-Emile Blanche. De courtes missives fabuleuses. Les deux dernières, datant de l'année du suicide de Rigaut, sont bouleversantes. Ces dernières années, quelques éditions partielles des Ecrits sont sorties, dans de petites collections de poche relativement confidentielles. Si un jour vous croisez Rigaut chez un bouquiniste, dans un grenier ou au supermarché (rayez la mention inutile), cessez tout séance tenante et lisez.
Ubu
Ubu- MacaDeb
- Messages : 9
Date d'inscription : 13/02/2010
Re: Jacques Rigaut
Rigaut, le magnifique Dandy dada !
Son Roman d'un jeune homme pauvre, dans Littérature, la revue des proto-surréalistes :
http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/litterature/18/pages/10.htm
http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/litterature/18/pages/11.htm
http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/litterature/18/pages/12.htm
Le seul texte en ligne... Rigaut étant un écrivain du fragment, de nombreux aphorismes trainent néanmoins sur le net sur les sites de citations. Une petite compilation :
Son Roman d'un jeune homme pauvre, dans Littérature, la revue des proto-surréalistes :
http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/litterature/18/pages/10.htm
http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/litterature/18/pages/11.htm
http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/litterature/18/pages/12.htm
Le seul texte en ligne... Rigaut étant un écrivain du fragment, de nombreux aphorismes trainent néanmoins sur le net sur les sites de citations. Une petite compilation :
Il n’y a pas de raisons de vivre, mais il n’y a pas de raisons de mourir non plus. La seule façon qui nous soit laissée de témoigner notre dédain de la vie, c’est de l’accepter. La vie ne vaut pas qu’on se donne la peine de la quitter...
Il y a des gens qui font de l’argent, d’autres de la neurasthénie, d’autres des enfants. Il y a ceux qui font de l’esprit. Il y a ceux qui font l’amour, ceux qui font pitié. Depuis le temps que je cherche à faire quelque chose! Il n’y a rien à y faire.
Je ne me sens vivre qu’à partir de l’instant où je sens mon inexistence. J’ai besoin de croire à mon inexistence pour continuer à vivre.
L’ennui, c’est la vérité à l’état pur.
L’incrédulité est plus forte que les miracles.
La plus belle fille du monde ne peut me donner que ce que j’ai.
Le jour se lève, ça vous apprendra.
Les amours de mes amies sont mes amours.
On n’a qu’une chose à soi, c’est son désir.
Quand je me réveille c’est malgré moi.
Si je doute de mon existence, je ne conteste pas l’existence, mais seulement qu’elle soit mienne. L’usage du possessif m’est interdit.
Aidez-moi, j’aiderai le ciel.
Il n’y a de progrès, de découverte que vers la mort, il n’échappe à personne que l’adage tous les chemins mènent à Rome est une sorte de calembour, Rome ne pouvant signifier que mort que l’on a retourné.
Je serai un grand mort.
Essayez, si vous le pouvez, d’arrêter un homme qui voyage avec son suicide à la boutonnière.
Son désir, c’est probablement tout ce que l’homme possède, au moins tout ce qui lui sert à oublier qu’il ne possède rien.
Un livre devrait être un geste.
Une prison : regardez-vous vous-même.
Cette émulation à inventer des routes plus légitimes vers une mort qu’on l’on a dans sa poche depuis l’âge de raison.
Les questions sont faites pour être posées.
N'hésitez pas, vous dis-je !
Ubu
Ubu- MacaDeb
- Messages : 9
Date d'inscription : 13/02/2010
Re: Jacques Rigaut
Belle contribution.
Nilo, à suivre.
Nilo, à suivre.
_________________
... Tu lui diras que je m'en fiche. Que je m'en fiche. - Léo Ferré, "La vie d'artiste"
Re: Jacques Rigaut
Les deux dernières lettres de Rigaut dont je parlais plus haut.
La dernière lettre connue :
Jacques RIGAUT, « Lettres à Jacques-Emile Blanche », in Jean-Luc BITTON, « Salut à Jacques Rigaut », in Nouvelle Revue Française, Octobre 2004, n° 571, p. 95-97. Copyright des lettres : Bibliothèque de l'Institut de France - transcription Jean-Luc Bitton.
Evidemment, cela se passe de commentaires.
L'unique photographie où Rigaut sourit, retrouvée par J.L. Bitton :
(adresse d'origine : http://rigaut.blogspot.com/2006/12/cadeau-de-nol.html).
[sans date, probablement mai 1929]
Cher Monsieur Blanche,
Je vous demande comme une grâce de m’accueillir deux ou trois jours à Offranville, quoique je n’aie pas encore reçu de réponse de vous. Rien ne peut m’être meilleur qu’un changement d’habitudes et d’air, outre tout ce que j’y trouverai. Je tâche de me donner la date de départ comme une limite à atteindre et je ne sais pas si j’y réussirai. Je ne sais pas comment je ne me suis pas tué avant hier, et comment hier et comment cette soirée se passera. Autrefois, c’était quelque incident de la journée qui déterminait mon ennui avec l’impact-suicide, à présent c’est à des accidents que je dois ne pas m’être tué. Samedi, Drieu est entré dans un café où je n’attendais plus personne, après avoir traîné au cinéma et dans les rues. Je crois bien qu’il m’a gardé la vie. J’ai brûlé toutes les lettres que j’avais gardées et tout ce que j’ai écrit. L’obsession prend une forme maladive, à laquelle je voudrais sincèrement échapper ; comment veut-t-on que je travaille quand pendant une heure je me suis demandé si j’aurai le temps d’entendre la détonation.
Il n’y a plus une forme de vie que j’imagine avec complaisance, pas une imagination que je retienne avec désir. Et en même temps que j’ai perdu toute espèce d’idéal, mon appétit subsiste. Le désir d’amour est bien loin du visage des femmes. Jamais je n’ai tant pensé à l’amour, il n’y a pas une maison où je pénètre, pas un tramway où je ne monte sans que je pense que c’est là, et jamais je me suis senti aussi incapable d’amour. Quel sourire, quelle grâce, quels cylindres, quelle fourrure ou quelle fantaisie d’esprit pourraient m’attacher. En amitié c’est déjà fait : je n’ai retenu près de moi que ceux qui feignent quelque affection pour moi – famille et quelques imbéciles exceptés, bien entendu – et c’est cela qui me plaît d’eux. Il n’y a pas si longtemps que je ne tenais aux gens que par la confiance qu’ils me refusaient. Le plus gros stimulant était le « Non » qu’on opposait à une velléité mince pourtant. Les seules imaginations ou je me complais quelques fois sont enfantines et très cinéma. Il y à ma portée une voiture découverte blanche. Une femme met sur son visage de poupée un casque de cuir et sur son dos un manteau de cuir. C’est elle qui conduit la voiture qui à présent est rouge. Nous partons, la vitesse, j’ai aux pieds de gros souliers anglais. Si je pense qu’il faudra s’arrêter pour manger ou dormir, l’histoire ne m’amuse plus et je cherche autre chose. Il n’y a pas autre chose. La luxure est provisoire et les drogues ne m’amusent plus.
Pardonnez moi de vous parler ainsi, à vous qui me dites que vous êtes sensible à ce qui m’arrive. Ces choses ne sont pas très graves, et je ne m’attache aucune importance. Le Grix au milieu de tant de choses amicales qui m’ont ému se demandait s’il n’y avait pas beaucoup d’orgueil là-dedans. Tout se passe entre les quatre murs de ma chambre et je suis à plaindre. Je préférerais vivre, mais je fais ce que je peux. Les matinées passent aisément, c’est à quatre heures que commence l’idée fixe.
A vous
Jacques Rigaut.
La dernière lettre connue :
6 juin 1929
Cher Monsieur Blanche,
[…] J’aimerai vous voir, si j’étais dans l’humeur de communiquer avec qui que ce soit. Ce n’est pas le cas. Cet état, qui n’est pas nouveau quoique exceptionnellement développé, j’en sortirai sans doute, et ce n’est pas le moins mystérieux. Je comprends à présent comment, malgré tant d’occasions et tant de sensations, je ne me suis pas tué déjà. Il n’est pas impossible, il est même fréquent, qu’on se tue à la légère – cependant si l’on est un peu disposé à savoir ce que l’on fait, je comprends qu’avant d’en arriver à la décision matérielle et pour rendre celle-là possible, il faut auparavant payer toutes les souffrances de la mort, souffrance physique (j’ai des douleurs au dos de la tête avec cette terreur dominante – enfantine – de rater) et souffrance de s’en remettre à un geste particulièrement insatisfaisant. Je cherche véritablement à ne pas mourir, mais comment y parvenir. Je vous embrasse.
JACQUES RIGAUT
Jacques RIGAUT, « Lettres à Jacques-Emile Blanche », in Jean-Luc BITTON, « Salut à Jacques Rigaut », in Nouvelle Revue Française, Octobre 2004, n° 571, p. 95-97. Copyright des lettres : Bibliothèque de l'Institut de France - transcription Jean-Luc Bitton.
Evidemment, cela se passe de commentaires.
L'unique photographie où Rigaut sourit, retrouvée par J.L. Bitton :
(adresse d'origine : http://rigaut.blogspot.com/2006/12/cadeau-de-nol.html).
Ubu- MacaDeb
- Messages : 9
Date d'inscription : 13/02/2010
Re: Jacques Rigaut
"Le jour se lève ça vous apprendra ", je l'avais mis en exergue d'un de mes textes.
Je vais aller fouiller, ça m'apprendra.
Merci.
Je vais aller fouiller, ça m'apprendra.
Merci.
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