Les nuits coulaient des jours aussi longs que l'ennui

Les nuits coulaient des jours aussi longs que l'ennui


Les nuits coulaient des jours
Aussi longs que l'ennui
Sur les quais d'une gare
Abandonnée au vide
Et au vent qui battait
Les cadrans des horloges
Aux aiguilles bloquées
Sur l'heure du départ.

Le panache oublié
Des fumées électriques
Sentait la sueur froide
Et la vinasse tiède
Dans ce buffet sordide
Aux banquettes percées
Où se vautraient le temps
Et la crasse incrustée
Des lames du plancher.

Les néons délavés
Perdaient leur arrogance
Sous le ciel d'un plafond
Noirci du désespoir
Des mégots oubliant
Au fond des cendriers
Les bouches édentées
Et les lèvres rougies
Auxquelles ils s'accrochaient
Du temps de leur splendeur.

Un chien qui ne devait
Presque rien au hasard
Dormait près du comptoir
Aux pieds d'un improbable
Client de circonstance
Aux valises plombées
De ses amours défaites
Posées là sur le sol
En attente de rien
Depuis que la consigne
Avait fermé ses portes.

Un couple qui noyait
Ses yeux dans ceux de l'autre
Complétait ce décor
Planté depuis des lustres
Derrière les carreaux
De la porte à battants
Qui ne battait plus trop
Que sur le temps qui passe
A force de cogner
Les murs tachés des ombres
De tous ces inconnus
Qui ne prendront jamais
Ni un train ni le temps.


Nilo.

C'est le premier texte que je lis sur ce forum et il m'a vraiment embarquée dans son atmosphère tellement évocatrice qu'elle prend au ventre. J'y étais, vraiment !

Comme l'on se sent parfois dans ces hangars de consigne.

Le savant mélange d'émotions violentes et de douceur... J'aime chez toi la finesse du regard, qui observe les âmes à nue et nous les restitue si vraies.

"Les nuits coulaient des jours
Aussi longs que l'ennui"

J'ai hâte de te lire sur de plus longs textes.

Z, dans les fumées électriques.

"Les nuits coulaient des jours
Aussi longs que l'ennui"
Très musical !
Belle ambiance, on s'y croit.
Seules les lames de plancher m'ont posé problème, mais c'est à cause de l'accent de Cabrel qui s'est imposé à moi à ce moment là

Merci à vous.
Z., je ne suis pas un coureur de fond... Alors je risque de te laisser sur ta faim d'envie de longue distance.

Nilo, sprint gagné sur l'écume.

le cœur gros ...
comme un quai de gare et la montre molle


ez

Ce que j'aime, quand je te lis, c'est la foule d'images qui dépeint bien les lieux et fait ressortir à la lecture les lieux et leurs sentiments.

Je dirais que tu peins tes poèmes.

Sylvie

je voulais dire à Givence que pour une première lecture, elle est tombée sur un poème de 1er choix !!!
je voulais dire à Sylvie que j'ai adoré ça : "tu peins tes poèmes "
je voulais dire à Nilo quelque chose de nouveau mais je ne peux pas :
Nilo, j'aime tes poèmes, leurs rythmes, leur style, leur ambiance ..............
Yzaé, pas originale !

Après avoir remercié les premiers passants à s'être arrêté ici j'aurais mauvaise grâce à ne pas le faire pour vous.
Surtout que ce sont des passages qui me touchent.

Nilo, voyage léger.

Dans l'interview tu disais être un homme de bars, ça transpire ici, dans cette galerie ou les mots sont tableaux. croquer le quotidien sans esbroufe, ainsi, c'est, selon moi, l'expression du talent.

Superbe évocation de ces quais sans départs et de ces voyageurs coincés dans leur ennui.

Derrière les carreaux
De la porte à battants
Qui ne battait plus trop
Que sur le temps qui passe

Le rythme syncopé de l'hexasyllabe ajoute encore au pathétique de ce sombre tableau.

et il y a quelques chanceux qui peuvent le lire sur papier

C'est un joli début, de commencer par toi Nilo. Un joli honneur que tu lui as fait, un grand moment de plaisir que tu nous donnes. Merci encore.

Ces derniers mots me touchent d'autant plus que j'ai une tendresse particulière pour ce "tableau".

Nilo, peintre en lettres.

Pour moi, personne ne saura aussi bien que vous "croquer" la vie en mots !

A chaque lecture de vos textes, je reste un long moment pensive...
Vous m'emmenez toujours là où je suis jamais allée !
Et...j'aime ça !

H.

Nilo, vos textes bientôt sur mon étagère à côté de Supervielle, Fombeure et Careme...

Roseline-and-the-Moon a écrit:Nilo, vos textes bientôt sur mon étagère à côté de Supervielle, Fombeure et Careme...

Pour ça c'est facile, il suffit de passer commande ici.
En tout cas, merci de cet intérêt, et pour l'illustration.

Nilo, vpc.

J'ai fait le vœu de mettre mon aumône dans la sébile de tous les mendiants que je trouverai sous toutes les portes cochères qui mènent au Petit Etablissement de Crédit que je viens d'ouvrir au profit de ceux qu'en ont pas besoin. En particulier à la Six-septième liste que j'vous ai filée.
Juste histoire de pas avoir bossé pour rien à les chercher pasque si j'compte que sur vous j'crains qu'y en ait qu'entendent pas le son de votre obole tombant dans leur coupelle.
Charité bien ordonnée...

Dédé.

j'avoue n'avoir apprécié qu'après la lecture de certains commentaires bien que pour moi, ceci représenterait plutôt le passage d'un roman qu'un poème à proprement parler

Si tu le dis...

Nilo, art roman.

pas un roman de gare en tout cas, c’est certain.

Dam, tout le contraire même.