Les silences de l'espace

Elle me disait, j'aimerais tu saches tout de la solitude
et des silences de l'espace
je ne l'écoutais pas me parler de l'espace et de la solitude
je regardais ses yeux et ses mains qui jouaient dans l'air
et puis il y avait ce jazz un peu plus loin

le soir on dînait de silences et de spiritualité
elle installait des bougies d'encens dans la cuisine
et dans le salon, les pièces sentaient les fleurs
et les feuilles à infuser, elle me racontait des exils
qu'elle n'avait pas osés, des exotismes aussi

je lui demandais ce qu'elle voulait dire par la solitude
et ces silences de l'espace, puisqu'elle était là, à côté
à quoi bon imaginer qu'elle n'y soit plus
je lui riais au nez des idées d'enfant, comme des rêves inflexibles
je lui disais, ne me regarde pas comme ça
nous sommes tous les deux, c'est infini d'être deux

elle préparait des plats que je ne connaissais pas
je pense qu'elle les inventait pour moi, pour me surprendre
ils se teintaient de l'arôme des fleurs et des feuilles
au travers des fumées de l'encens je discernais à peine son visage
comme un masque qui ne dévoile plus rien, qui cache tout
même les airs de jazz s'embrumaient, j'avais l'esprit ailleurs

tu sais, la solitude ne devra pas être ton ennemie
elle n'est pas indomptable, il y aura tant à faire
à écrire, elle est immuable mais pas indomptable
elle répétait ces choses que je feignais de ne pas comprendre
je préférais encore regarder ses mains dessiner n'importe quoi
pourvu que cela me dérive, ses mots m'apparaissaient inutiles

quand je me couchais après avoir essayer de saisir l'origine de ses plats
je repensais à ces lieux que nous n'avions pas visités
ni elle ni moi, à ces rêves qui respirent le même air que nous
alors je fermais les yeux, et je la voyais marcher sur des dunes irréelles
à toucher les pierres qui lui racontaient peut-être des histoires
je n'étais pas avec elle, elle marchait seule et caressait seule ces pierres

chaque soir, elle insistait sur ces silences surnaturels venus de l'espace
mon univers se restreignait à ces mots sans réalité
qu'avais-je à voir avec tout ça, son obsession me fascinait
tout autant qu'elle me faisait frémir, je lui disais
ne me parle plus du silence, parle-moi de ces lieux
que nous n'avons pas encore visités, parle-moi des pierres de mémoire
et du vent qui frôle le corps

un soir que je m'endormais le ventre plein des effluves de l'encens
je me dis qu'elle voulait dire autre chose
mais qu'elle n'osait pas me dire, elle devait me protéger pensai-je
je n'aurais su dire de quoi elle tentait de me persuader
et lorsque la réponse m'apparut clairement, je m'endormis
ce devait être rêve ou quelque chose d'approchant

Je pense vraiment que le LC nouveau est arrivé.
Un bon cru qui ne demande qu'à mûrir, vieillir, et enchanter les amateurs.
Elle me disait, j'aimerais tu saches tout de la solitude
et des silences de l'espace
A consommer sans modération.

Nilo, taste-poème.

Il est très difficile d'accepter, de se dire..."plus jamais"...alors on plonge dans "son" souvenir pour en extraire la poésie qui habite au plus profond.

Ce poème touche véritablement

Sylvie