Memorie

Elle a oublié le temps , oublié jusqu’à son propre visage, oublié les prénoms et les anniversaires, les villes et le village ou elle habite. Elle a oublié les mots, tout ce qu’elle ne « ressent » pas ou plus n’a plus de nom.
Lui reste les habitudes , les mots qu’elle a toujours dit, les mots qui font partie d’elle même : « orangers », « chevaux », « bourgeons », « travail », » enfants »..et des phrases , comme de vieilles rengaines « tu vas prendre froid » , « couvres toi ».. « j’ai du travail » …des morceaux de phrases qui s’ajoutent à des morceaux de mots pour former une conversation qui n’en est plus une mais dont elle ressent encore le besoin…comme une preuve de présence, un réconfort dans la solitude qui l’envahit chaque jour un peu plus, qui l’enferme inexorablement dans l’oubli.

Elle a oublié sa propre histoire, comme un trou béant dans sa mémoire , un gouffre sans fond ou tout serait tombé .
Elle est devenu l’automate de ses propres habitudes, qui bouge et remue au gré de ce qu’il reste d’elle même : sa personne , tout son être, son âme dépourvue de tout ce qui se retient.

Et moi je la regarde et je la trouve si belle.
. Les mains jointes posées sagement sur ses genoux, elle remet soigneusement ses cheveux derrière ses oreilles , vérifie machinalement que les boutons de son gilet sont bien en place.
Alors je lui dit « J’y vais ! « et là sa main prend la mienne, la serre fort et ne la lâche plus, comme si cette main me disait « reste, ma petite fille ».

Ces choses là ne supportent pas le bruit.
Donc, silence, encore.

Nilo, ...

Beaucoup de frissons, en silence aussi.
Messaline.

Snif !

Parfait ce silence !

ouuuuuuuuuuuuuuuh, ma Lalou, un clic-Dédé que je me prends en pleine figure ... souvenirs ...
je comprends le silence ... quoi dire ?
sinon qu'on est tous là ... parce que je sens que ce que tu dis est vécu ...
je t'embrasse
Yzaé

Vécu, oui et dit avec amour. Merci Lalou

Quand Lalou et son stylo-plume nous parlent d'amour.

Z.

sobre, simple, comme une flèche qui atteint son but.

Il a bien fait de remonter ce texte. Émouvant.

..ça me fait trout drôle...

Elle est partie depuis.

Alors je t'embrasse.

Le printemps de la prothèse m'amène ici.

Et bien après avoir lu tous les commentaires (en l’occurrence ton dernier lalou), joint à ça la mort d'Annie Girardot, je dois dire que, hormis un bourdon, je vois pas ce que je pourrais mettre.

Merci.

C'est con mais je suis contente que ces mots soient posés ici....pour longtemps.

Pour ma Marguerite

Loués soit donc Dédé et Le Printemps de la Prose qui permettent à ce beau texte d'éclore à nouveau.

Nilo, in memoriam.

J'ai fait le vœu de mettre mon aumône dans la sébile de tous les mendiants que je trouverai sous toutes les portes cochères qui mènent au Petit Etablissement de Crédit que je viens d'ouvrir au profit de ceux qu'en ont pas besoin. En particulier à la Treizième liste que j'vous ai filée.
Juste histoire de pas avoir bossé pour rien à les chercher pasque si j'compte que sur vous j'crains qu'y en ait qu'entendent pas le son de votre obole tombant dans leur coupelle.
Charité bien ordonnée...

Dédé.