Veille

Partir : en voilà quelque chose qui a du sens ! Cette pensée m’a sorti de mon lit comme une gifle. Sans nécessité de mesure. Le départ n’en a pas. C’est une sensation qui souffle sur tout le corps et lui donne une force nouvelle. Je n’ai plus sommeil. Je ne suis plus géomètre des plaintes. Partir, c’est n’être plus celui qui ose encore regarder, dans une glace, les traits produits par son dégoût.
Le départ oublie l’accessoire. D’où vient ce mur ? De quelle sorte de granit suis-je fait? L’égo écrasera tout, quoi qu’il advienne. En évidence, il considère. Dans ses assauts il emporte tout avec lui : l’effroyable machine de mort. Partir tient en éveil ; il me semble tout quitter, mes meubles, mon plafond, mes habitudes. Comme une peau-fumée qui s’évapore. Au fond c’est là, dans tout immobilisme, que l’homme s’acharne à se voir mourir. Il en mettrait vingt fois le ralenti. Comment l’égo et le sensible peuvent-ils cohabiter, si proches - amants? D’où vient-il, ce corps étranger qui me ronge? Suis-je enclin à la dictature?
Partir : en voilà quelque chose qui a du sens. Ce n’est pas seulement bouger : c’est tendre à. Dans le verbe, dans sa profusion, dans les glouglous de sa maîtrise, il y a cette laideur bouillonnante. Comme un enfant qui se ferait vomir. Je ne suis plus géomètre des plaintes. J’ai tout emballé, j’ai changé les cordes à ma guitare. J’ai coupé mes cheveux. Partir, c’est l’obsession autre : il y a quelque chose de la fin d’hiver. L’absolution d’enfin, après les larmes, retrouver mes bêtises : créer, libre.
Je cherche la pâte à modeler du monde.


Z 8 11 10

Ah que oui !
Quel beau "texte court"?
Et cette fin
Je cherche la pâte à modeler du monde.

Nilo, chant du départ.

La pâte à modeler et L'égo, si ça c'est pas un retour en enfance.

Et puis, si tu ne fais que tendre à, partir restera toujours une idée, un fantasme sédentarisé.

Bah !!

Heureusement qu'il y a le printemps de la prose !

Jamais vu ce texte de Z : heureusement que je suis admin ici ...honte à moi!

Partir c'est apprendre.

Très beau texte en effet.

Une invitation au voyage et une mue qui s'opère au fil des mots...

Ton questionnement va loin, très loin. Passionnant et inquiétant. Trouver un compromis acceptable, raisonnable (ce n'est pas renoncer, c'est "tenir").

Dam.

Moi non plus je n'avais pas vu ce texte qui représente le questionnement de la vie.

J'aime beaucoup ce passage:

"Partir : en voilà quelque chose qui a du sens. Ce n’est pas seulement bouger : c’est tendre à."

Contente que quelques uns aillent taper dans le printemps, ainsi ça me fait voir ce que j'ai manqué.

Sylvie

Tout pareil que Sylvie

Et puis le départ pour toi semble similaire à fuite. Une fuite loin de l'égo? Hélas il nous suit partout

"Partir, c’est l’obsession autre : il y a quelque chose de la fin d’hiver. L’absolution d’enfin, après les larmes, retrouver mes bêtises : créer, libre."
La liberté existe sans doute vraiment dans la créativité, même si elle peut être teintée de ce Grand Personnage qu'est l'égo...
Mais tes mots, comme toujours sont beaux et bien choisis ^^

Sasvata, contre l'égo, l'humilité est la clé

Courir le monde c'est parfois se muer soi même en pâte à modeler pour se fondre dans de nouveaux décors...

(très belle formule, à part ça...)

J'ai fait le vœu de mettre mon aumône dans la sébile de tous les mendiants que je trouverai sous toutes les portes cochères qui mènent au Petit Etablissement de Crédit que je viens d'ouvrir au profit de ceux qu'en ont pas besoin. En particulier à la Seizième liste que j'vous ai filée.
Juste histoire de pas avoir bossé pour rien à les chercher pasque si j'compte que sur vous j'crains qu'y en ait qu'entendent pas le son de votre obole tombant dans leur coupelle.
Charité bien ordonnée...

Dédé.

Marin puis diplomate je n'ai fait que partir ....Et j'en suis revenu!

l'iconoclaste