Aurores sous cadenas.

J’avais bientôt constaté la névrose. Elle voyait juste, la comédienne. La poésie est un pont : ligne tendue du chef-d’œuvre à la ruine. La plume-canon, lestée par la colère. Je venais pour la guerre. Écraser les murs d’enceinte! Pulvériser les édifices! Écrire sueur, les manches aux coudes, plonger le bras aux cuves bouillantes. “bagatelles pour un massacre”.
N’en être plus, le corps englué de paperasse, qu’à ronronner sa tourmente. Le mot macère. Toute écriture a propension à sédimenter, et à pourrir. Vendeurs de tripes : vendeurs de rêves? Flagellés de propagande?
Aurores sous cadenas. Portes et paupières closes, dans cette boîte-à-punitions, je voudrai bien qu’on me pardonne. Je n’y voulais que chercher l’homme : extraire, aux petites lueurs d’une nuit sans fin, le bon mirage. Je souffre d’une correspondance : lettres-mortes au petit roi des strophes. Pourtant je sens pousser, sur l’auréole, comme un acné de rêves. J’entends chanter l’alexandrin, tissé dans la lumière, le rythme cadencé de la rime. Tout le reste, ratures de pacotille, confettis de mon diktat, couronnes : je ne vous renie plus. Je vous lancerai, comme le reste, dans le grand ciel-espoir de l’innocence.

Issue : l’amour s’invente. L’ailleurs aspire à naître : la transgression du réel, c’est la joie.
Pardon! Les déjections au présent simple, les crève-coeur au barillet : pardon. La prose maquillée pour pas cher, les aboiements pour se convaincre, au deuil des grâces, de reposer quelque part : pardon. La laideur-panache est un mythe.



Z 10 12 10

J'aime bien "lettre morte au petit roi des strophes", et la fin aux invectives dignes de Ferré.

Swann,

J'avais, avant de lire le commentaire de Swann, exactement le même sentiment à propos de ce texte.
Alors le plus simple me semble d'abonder dans son sens.
Oui vraiment, j'aime cette fin.

Nilo, homme au clefs d'or.

Tu parles du sens des mots et du poids qu'on leur donne dans la vie qu'on veut légère, libre, libérée des inutiles fardeaux. Au change, et à choisir (car tu nous l'autorises), je préfère ta vindicte à toute autre dérive. Tu tiens bien la route mon gars !

Dam.

"je ne vous renie plus. Je vous lancerai, comme le reste, dans le grand ciel-espoir de l’innocence. "
ça j'adore ! pour ce nouvel éclairage..

J'ai du m'y reprendre plusieurs fois pour en ressentir tous tes mots, pour les faire miens et les savourer.vraiment dla bonne!