Autopsie d’un jour de vacances (1° partie)

Rêves de perfection, rêves inaboutis. Le petit matin s’étire : il hésite à traverser les rues sont pourtant vides. Vivre plus ou caresser encore une semi conscience molletonnée ? Pelotonné contre le coussin d’exécution, l’enfant cherche la lune…

Côté parc, la pluie lave encore l’urine séchée dans la terre salée.

Sur l’épaule de l’endormi à mes côtés, des serpents de mer sont enchevêtrés. Je m’éloigne un peu. J’hésite. Robe de chambre ou manteau ? J’opte pour un breakfast au Chat d’Oc. Dehors, la brume pique. Mon quatrième jour de vacances ressemble à un Doisneau. J’attends qu’Andy y dessine les lèvres de Marlène. Mon cheese-cake est mou. Le café lui met une claque. Dans la pénombre au fond du bar, quelques jeunes sont encore ou déjà là. Je compte les dreadlocks.

L’ascenseur grince. Le décor poilu est encore assoupi dans la chambre. Je m’approche avec la ferme intention de mettre en route la marée motrice. Pas moyen : la machine grogne et se noie dans le gris du lit. Je soupire. La douche fait des caprices. Bouton laiton grippé et eau brûlante. J’éteins lorsque le bac déborde.

« Leduca ? »
Leduca s’habille et s’en va. Le soleil est de retour. Bientôt novembre. Chacun savoure l’entêtement de son cœur à nier l’évidence; notre été indien tente de se convaincre que l’hiver est proche. Je bascule la couette sur le bord du balcon, côté tiède et moite vers le ciel.

Le téléphone sonne. Non je ne suis pas intéressée par la fibre optique : je nettoie la cuisine et range le salon. A peine je sors l’Huma d’avant-hier que la clé tourne dans la porte. Linge sale ou argent de poche ?? Coup double ! Mon fils dépose un énorme sac accompagné d’un : « -je repasse demain ! et ajoute, les polycops sont hors de prix tapa du blé ? » Versez 30 € et retournez à la case départ. Dans ce jeu l’oie c’est moi.

« -Tiens mon chéri ! »

Au moins il est presque aimable. C’est depuis que son copain de fac lui a expliqué : « fô respecté ta mèr ». Dire qu’il y en a qui critiquent les musulmans !

J’étends fébrilement lessive sur lessive et plie dès qu’un vêtement est presque sec. Sur l’ordi j’ouvre des pièces-jointes sans intérêt et réponds inlassablement aux sollicitations en précisant : « Je n’adhère plus aux Alternatifs. »

Je m’efforce de tout vider pour mieux comprendre le vide. Je savoure le calme comme la mer étale avant les grandes marées. Plus de réunions, fini les interminables comptes-rendus jusqu’à deux heures du matin à envoyer à des centaines de boites mail. Toulouse, ma ville fétiche, va continuer sa vie de ville alors que j’ai fait une demande improbable pour partir loin.
[ à suivre]