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Discipline cauchemar
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Macadam :: MacadaTextes :: Nouvelles
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Discipline cauchemar
En mer, en vrai
Ce radar-là était toujours actif et il s’agissait d’être toujours à l’écoute, sur la bonne fréquence pour trouver quelque chose. Se laisser glisser dans le courant ne suffisait pas toujours, car les Grands bancs l’empruntaient aussi pour se reposer... et ce banc était toujours devant, presque jamais derrière.
Un type seul remonte l’allée de graviers menant à la plage des rochers. Lentement, la tête basse. Cinq minutes plus tard, je le vois redescendre d’un pas alerte et la tête encore plus basse ! Il s’arrête, regarde à ses pieds et repart. Il s’arrête encore.
- Je peux vous aider, peut-être ?
- Oui... enfin, j’ai dû perdre une gourmette en or, par ici.>> (Il semblait ailleurs, sans expression, tel un fantôme)
Je regarde le périmètre, un terrain jonché de cailloux roses jusqu’à la digue qui s’étend tel un doigt gris accusateur sur la mer.
- Cherchez par là, dis-je. Je fais ce coin, ok ?
L’homme bougonna un juron et s’éloigna à trois mètres. Je lui tournai alors le dos pour être sûr... enfin, faire celui qui cherche. Si je la trouvais, j’avais déjà prévu ce que je ferais - la planquer en l’enfonçant d’un coup de talon ou en basculant une pierre dessus.
Discipline cauchemar
... Dans une ambiance de rats, tel un malfrat, qui téléphone après l’attentat à la tour de contrôle d’Atlanta... Convaincu d’une présence, jusqu’à sentir la chair brûlée dans mon propre rêve.
La seule discipline, à mon avis, non disputée aux J.O. 96 à Atlanta, c’était la chasse sous marine. On s’était rendu compte que les requins pullulaient sur les lieux de l’attentat, où l’épave du Boeing avait coulé. C’aurait pu être une discipline de folie : “la chasse au requin”. En définitive, cette odeur de cramé qui allait si bien avec mon rêve, elle provenait du cendrier où les dernières roulées écrasées, offraient le triste spectacle de la mort. C’est le début d’un autre cauchemar. Celui d’écrire mon cauchemar.
On sentait l’odeur de chair brûlée ; c’est qu’on ne s’était pas rendu compte que des morceaux de corps humains calcinés étaient retombés dans le jardin où les enfants jouaient ; le parc de l’hôtel trois étoiles qui accueillait les classes d’échanges Culturel intra-scolaire, à deux pas du village Olympique.
C’est à cause de ma cousine, ce cauchemar - pourquoi elle m’a parlé de ça, à table, quand on mangeait la Boumiane ? m’incitant à faire quelques plaisanteries cynique sur l’objet de la tragédie - 230 x 7 = 1610 litres de sang ; résultat : des requins partout. La seule discipline qui manquait à Atlanta “la Chasse sous marine”.
- Mais personne n’aurait voulu y aller ! s’exclame-t-elle.
- Pourquoi ? Par respect pour les victimes ? Qu’est-ce que le sport a à voir avec ça, franchement.
- Je ne sais pas... dit-elle, désintéressée, pour changer de sujet.
Mais personne n’aurait voulu y aller ; et on aurait annulé l’épreuve de toute façon, par respect pour les 230 victimes.
Moi, pour avoir évoqué ça à table, j’avais vu la force de 230 âmes résignées qui se rebellaient dans la nuit. J’avais allumé pour l’écrire, et m’en débarrasser, quand j’ai senti le cendrier sur la table de chevet... À table, j’essayais de lui dire que ça devait être un attentat, pour la seule raison qu’on ne disait rien, qu’on n’en parlait plus, après avoir retrouvé les boîtes noires de l’appareil. Mais on savait... on savait qu’il fallait laisser place aux Jeux, que ça ne servait à rien d’entretenir une psychose en disant la vérité. C’était une drôle de morale, peut-être purement américaine, de considérer que les gens ont déjà oublié - c’est se foutre du monde tout simplement. Le président a dit, Jacques a dit, un deux trois... AUSTÈRE ! Un deux trois... NUIT ! - Mais non, disait père, faut être plus souple que ça. Faut comprendre que des gens gobent ce qu’on leur dit... et si on ne leur dit rein, ils gobent encore plus. les gens gobent tout, tout le temps. Les gens sont fous..., pour laisser à ma soeur, son mari et mes deux petit neveux (le dernier n’avait pas deux semaines, le premier deux ans passé) le privilège de s’exprimer dans un autre registre - des cris et excès d’humeur impromptus, au pied levé (à défaut d’une main pour une claque) Le résultat est toujours le même. Ca ne change pas les choses malheureusement - oui, mais il y a quand même une différence entre un accident qui peut être évité et un autre qui serait du à la fatalité. << Ca peut toujours être évité >>, disait-elle. - Oui, y’a qu’à rester chez soi cloîtré, alors, comme ça, rien n’arriverait jamais.
Moi, c’est dans mon lit Breton “Bateau Calich” que “la fatalité” a frappé.
Je n’étais pas tout seul...
Y’a des choses qu’on ne peut vraiment pas accepter, comme celles de refuser brutalement de vivre avec son temps et en renvoyant les journalistes à l’âge de pierre pour un soit disant respect des familles, des victimes (et tout dans le sac). Je trouve ça d’une mauvaise foi monstrueuse. Bientôt on dira que les journalistes sont des assassins. C’est monstrueux et c’est fou ! Et si, d’un commun accord, on ne parle pas de ces choses-là, parce qu’elles sont trop graves pour assouvir la vergogne du peuple, on devrait donner la raison de ce choix sans détour... mais on ne le fera jamais. Pourquoi ? Parce que c’est devenu une affaire politique, et que le politique ne s’abaisse jamais devant le peuple.
*
La veille au soir, j’avais déménagé toutes mes affaires dans la chambre d’amis, en haut, là où il y avait la bibli-horreur de père et le fameux lit Breton bateau Calich. Je dormais donc dans une chambre vide, sans outils et sans rats. J’avais seulement mes feuilles blanches et mes draps pour me cacher de ces ombres fantômes de revenants qui m’avaient réveillées.
Quand je regardai l’heure à la pendule du four, c’était six heures. Je voyais poindre le jour par les volets à jalousie de l’entrée. Comme j’avais écrit jusqu’à deux heures du mat, relu jusqu’à trois et fait cet horrible cauchemar qui sentait le rat brûlé, je me sentais passablement las. D’ordinaire, la simple idée de déjeuner de bon matin m’aurait donné la pêche, mais là, je n’avais pas du tout faim ! Je sentais encore... je voyais et entendais encore ma mère dire : “je regrette d’avoir laissé sortir les enfants dans le jardin, ils se bouchaient le nez et jouaient avec des trucs louches, sans bruits. Ils rentraient avec les mains noires et tremblantes. Mon dieu...”
Juste à l’heure du déjeuner, j’écris encore ça, pour me dégoûter encore plus - non, simplement me fatiguer la main autrement. Se lever pour déjeuner allait être aussi dur que de soulever un de ces blocs gris qui font les digues cyclopéennes sur la mer ! Ce pouvait être aussi un moyen de prouver sa bonne foi, son intelligence, dans la fatalité. Oublier enfin qu’on pouvait refaire le monde avec des idées issues de rêves et des pires cauchemars ! Des mots, Démo....
(après le cauchemar)
Au matin, j’avais les yeux collés-crottés, hésitant encore en voyant le tube d’acide fusidique sur la tablette ; il me guérissait certes, mais d’un autre il faisait poindre des boutons de fièvre au coin de la bouche. L’esthétique en prenait un coup de toute façon, que ce soit l’oeil rouge ou la bouche qui germait en rouge...
Je savais aussi que la brûlure intense qui suivait l’application ne serait pas sans me rappeler... et je n’avais pas besoin de ça, cette torture matinale ! Pourtant, je me rendis compte trop tard que l’oeil me brûlait déjà sous mes battements de cils ; l’esthétique et la douleur, on en était à un partout - seulement descendu d’un cran - mais les yeux d’un peintre...
D’habitude ou mal réveillé, l’inconscient agit de même, avec la même détermination. Est-ce une force mauvaise ou bonne ? Quand le contrôle m’échappe, est-ce que je fais mal ou bien ? Éternelle question, que le jour qui suit se fera une joie de résoudre pour moi, sans même le demander. Le temps prend les devants quand l’inconscient s’en est mêlé, pour nous apprendre qu’il ne faut pas trop perdre les pédales, trop souvent - le temps ne rate personne, car il est devant, éternel premier. Le temps n’a pas besoin d’aller de l’avant, de courir après quoique ce soit puisqu’il est déjà devant. Il faut s’en souvenir inconsciemment pour que les forces cachées ne soient plus celles du mal, systématiquement. Le temps est roi et on n’y peu rien ; guerre des étoiles ou pas, projets interstellaires qui nous dépassent tous, prouesses techniques pour la marine ou l’aviation... Seule l’oeuvre d’art a une chance avec le temps.
Comment j’en suis venu à devoir expliquer ça, et me rabaisser de la sorte ! me rendre si ridicule que plus personne ne m’écoute, car, doit-on se dire, on ne peut plus rien pour lui. C’est son problème, je ne vois pas comment... en quoi je peux...? Et merde ! Chacun son truc et j’assume ce que je fais moi ! Je ne sais pas ce que je fais mais je l’assume un point c’est tout. Et si je dévoile des instants de faiblesse, c’est peut-être pour me croire encore humain dans ce monde où la machine est reine.
Règne en maître
La machine
Traîne en flèche
La maline
Qui de ses simples formes
Sait qu’elle aura le dernier mot.
Contour qui tue
Fait la différence
Car la vertu
N’est plus
D’être immense
Comme ces tours
Crevant le ciel
Ou ces digues
Zébrant la mer
Mais de savoir mentir
Avec ses atouts
Atouts de base
Font la différence
On en est revenu à l’âge de pierre
Où les hommes étaient des Dieux
Puissants comme la nature
À en faire des statues cyclopéennes
Pour se rassurer quelque part
Que l’homme commande en tout
Même si c’est une farce
Il n’y a qu’à être farceur dans l’âme
Et le tour est joué.
On y croit.
Sans se poser de questions
On y croit.
Et puis
Les statues sont tombées
La légende effondrée
Terrassée par la machine
Qui incarne le mal
Dans toute sa splendide laideur.
On dit maintenant,
Qu’il faut vivre avec son temps, faire tout (un maximum) avec les moyens de son époque, pour avoir une chance... Mais combien de destins noyés, de vocations détournées et perdues, d’âmes en peine à mettre au crédit de “son temps” ? Combien de malheurs et pour encore combien de temps ? Si les choses vont plus vite aujourd’hui, grâce à la machine, on se lassera plus vite... peut-être pour revenir à un style de progrès plus humain et plus digne de la nature qui nous émerveille tant, et du temps. Un mode de pensée plus humain inspiré par la terre, la pierre. La seule pierre des générations passées, présentes et futures - sûrement futures - la Pierre des âges.
Maintenant,
Bien, vous savez : partagé entre l’écriture et la peinture - deux expressions qui ne se valent pas de peine -, je vous offre une oeuvre de silences répétés, approbateurs applaudissements et néant, mais jamais d’attente... Silence qui n’est que le passage de l’air au monde clos marin, merveilleusement hostile et hospitalier pour qui sait reconnaître le vrai du faux, le bon du mal, le bête du sensé, le stupide du malin.
On aurait peine à croire que tous les sentiments connus ne se mélangent pas dans cet univers liquide : c’est que l’âme qui les renferme est encore plus close ! On y va pour se délecter de sa suffisance liquide ; on y reste le temps de savoir ce qu’on est vraiment avant de savoir qui on est. En réalité, on ne vaut guère mieux que ces sars qui, d’un coup de queue, vous mettent cent mètres en un clin d’oeil ! Parce qu’ils ont passé le test Olympien il y a belle lurette, peut-être six mille ans ? Ah ! que j’aimerais être un terrien de l’an six mille pour les retenir de mes doigts tendus aux couleurs marines ; mais il suffit peut-être d’y croire... Pour l’heure, il n’y a pas d’autres moyens que de laisser divaguer l’âme.
Devant cette vérité de mouvement, où tout est plus fort et plus que vrai, il ne suffit pas de croire, il faut être - et je sais qu’on ne sera jamais.
Zovattoc! Nul peintre n’a jamais été plus homme ; j’en ai tiré l’avantage de faire ce que j’aime en allant chercher aventure, sans contrainte (seulement physiques), le vent de face ! pour revenir à la dure réalité de ce métier où les rats n’ont jamais souri autant aux hommes. Mais j’ai changé d’optique...
Dam.
17 Août 1996
Re: Discipline cauchemar
Règne en maître
La machine
Traîne en flèche
La maline
Qui de ses simples formes
Sait qu’elle aura le dernier mot.
Contour qui tue
Fait la différence
Car la vertu
N’est plus
D’être immense
Comme ces tours
Crevant le ciel
Ou ces digues
Zébrant la mer
Mais de savoir mentir
Avec ses atouts
Atouts de base
Font la différence
On en est revenu à l’âge de pierre
Où les hommes étaient des Dieux
Puissants comme la nature
À en faire des statues cyclopéennes
Pour se rassurer quelque part
Que l’homme commande en tout
Même si c’est une farce
Il n’y a qu’à être farceur dans l’âme
Et le tour est joué.
On y croit.
Sans se poser de questions
On y croit.
Et puis
Les statues sont tombées
La légende effondrée
Terrassée par la machine
Qui incarne le mal
Dans toute sa splendide laideur.
Voilà un poème qui pourrait être posé dans la rubrique "poème" ...j'aime beaucoup les images et ce qu'elles traduisent.
Pour le reste je ressens toujours cette petite révolution de "liberté" que tu clames et qui, j'espère bien, est respectée...
J'ai toujours envie de dire que notre liberté se trouve dans nos rêves....là où personne n'entre sans permission.
Sylvie
Damien,sylvie
J'ai lu et relu ton texte et il ressort un fort tourment...mais c'est bien écrit, marc
tremsal- MacadAdo
- Messages : 113
Date d'inscription : 12/08/2010
Macadam :: MacadaTextes :: Nouvelles
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