Les papillons du Guatemala

Je regarde mon frère, spectre rouge bien vivant
avançant tête baissée dans la brume

des silences de recueillement

Maman est un mot de pensée

je lui parle. Pour la première fois
ce n'est pas que je craigne les fantômes
ce n'est pas que je ne croie pas aux fantômes
je lui dis que j'ai arrêté de me ronger les ongles
que mes voyages seront ses épopées invisibles et muettes
je lui dis « j'irai cueillir des papillons au Guatemala
et je les déposerai dans ta main
comme de petites fleurs exotiques »
je récolterai le meilleur tabac du monde
on fumera ensemble des cigarettes roulées
avec le meilleur tabac du monde
sur le balcon de nos mémoires
je lui dis enfin « je reviendrai de Tiznit
avec des bijoux de cuivre et d'argent
on les regardera briller sous l'ampoule nue
avant que tu ne les portes à ta bouche »

Ma ligne de vie est trop longue pour moi
j'essaie de la faire glisser hors de ma main avec mon pouce
en direction de ceux qui restent d'Elle

En pensée, les mots n'ont pas peur des fantômes

Très touchant. Un joli regard sur les choses

Sasvata, et non, ta ligne de vie ne peut pas être trop longue (d'autant que tout dépend de quelle main on parle...)

touchants papillons,
la fin m'a vraiment ému.

...merci pour ces mots.
Ils tendent à faire surgir un mouvement de pensée vers d'autres petits êtres chers...en état d'éveil, alors que souvent ce mouvement n'existe qu'en rêve (pour ma part).

Un bel élan de générosité, de partage et d'ouverture.

Dam, leçon de choses.

Belle lettre d'amour par personne interposée.
J'adore ça :
je lui dis que j'ai arrêté de me ronger les ongles
que mes voyages seront ses épopées invisibles et muettes
je lui dis "j'irai cueillir des papillons au Guatemala..."
Et son battement d'aile fera frissonner quelque chose du côté de chez Elle.

Nilo, bout du monde.

Un très beau texte, tout en espaces sensibles et chuchotements.
A te lire.

Z.