Âme de poussières

Ton beau manoir, mon Amour,
Ton triste manoir, mon Amour,
Que cache-t-il dans ses pourpres couloirs,
Ses artères, ses nerfs
Rouges
Qui parcourent son précaire squelette ?

des devinettes, mon cher
des devinettes

Pour toi - pour te supporter hors de ton lit de poussière,
J'ai foulé ses cimetières de tapis mouvants,
Ses corridors tapissés de ténèbres ;
Pour toi - pour te restituer les couleurs du présent,
J'ai parcouru ses galeries de regards menaçants,
Ses tableaux peints dans la chairs et le sang.
Et pour quoi ?

des devinettes, mon cher
des devinettes

Et ces bruits ! ces bruits !
Bruits plus assourdis que des soupirs,
Plus douloureux que des maux aigus,
Plus lascifs que des éclats de rire,
Bruits atroces aux pleurs contigus ;
Qu'étaient-ils, ces bruits ?

des devinettes, mon cher
des devinettes

N'entends-tu pas,
Dans les veines des murs
Suinter
Le vin capiteux de tes luxures passées !
Qui sue, qui sue
Et la souillure et le temps ?
N'entends-tu donc pas !
Dans le gouffre des armoires
Au fond du dédale des luxueux appartements
Gémir
Les dentelles faméliques de tes jarretières
Les squelettes fantomatiques de tes guêpières ?

des devinettes, mon cher
des devinettes

Ton beau manoir, mon Amour,
Ton triste manoir, mon Amour,
Toujours taciturne, toujours mélancolique
Sous le linceul pluvieux qui mouille ses carreaux,
Je ne t'y suivrai plus, je ne t'y chercherai plus:
A ton Ombre, mon Amour disparue,
Et les convives moroses de son tombeaux,
Je laisse le peu qu'il reste de toi :

des devinettes, mon cher
des devinettes