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les dramaturges en cravates.
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Macadam :: MacadaTextes :: Textes courts
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les dramaturges en cravates.
ESSAI –
Il y a un problème pour l’adulte. Il est difficile d’analyser ce que, par dégoût, par refus ‘inné’, l’on rejette ; pourtant c’est l’adulte qui m’intéresse. Il me fascine autant qu’il me répugne. Est-ce là le premier pas, le drôle ?
Il y a eu de nombreuses tentatives ; peut-être une révolution. Les adultes, rappelle-toi, avancent casqués. On croirait l’enclume sur le monde, tant la chose est lourde, défigurée. Elle traîne, comme le chien du village, des casseroles pleines de larmes. Une certitude émerge : la plupart du Monde Adulte consiste à fractionner. Le temps pour l’argent, le temps pour les ‘tâches quotidiennes’ ; le temps pour l’amour et le rire, s’il en reste.
De cette certitude, un constat : s’il fallait comme en Droit une pyramide, celle du Monde Adulte est dans le mauvais sens. Bien sûr, il n’en faudrait pas. J’envisage comme une drôle de monstruosité cette manie des ‘sections’ : le truc ‘vie’ n’est pas une carte d’Etat major.
Le réel problème (déclencheur) restant celui-là : l’adulte est-il plus ou moins que l’enfant ?
Je sais qu’il ne m’inspire qu’une sorte d’horreur ou de pitié, mais l’un ou l’autre changerait la donne. La première impression est telle : un bloc de métal froid où se greffent, au hasard des douleurs et des décennies, d’autres pièces brûlantes destinées à refroidir. La chose est gigantesque, cul en terre, Assise : j’ignore si elle s’engonce ou déborde.
__________
Avant la seconde impression, il faut que je précise mon sens de l’enfant. L’enfant n’est pas défini par la pyramide Adulte – comme faisant partie d’une ‘section de temps’. Dès qu’il en prend conscience, il conserve en combattant ses deux vérités : l’enthousiasme et le cœur. L’enfant s’engouffre dans la joie, la douleur et le truc ‘vie’, et s’engouffre de la même façon dans leur fin. Il est vivant : en désordre.
Il est probable que le Monde Adulte ne connaît pas les petits-déjeuners à minuit, les herbes à rêves, les étoiles filantes ; tout ceci échappe au grand Disque dur. Le truc ‘vie’ est exactement hors des cartes d’Etat major.
Par là se trouve la seconde impression : de petits embryons jonchant une plaine. Privé d’enthousiasme et de cœur, l’adulte erre nu : paralytique algorithmé, prisonnier d’une morale-éthique ridicule. Qu’en faire, de cet ersatz d’enfant si vieux qu’il sombre (par hasard) dans l’hideux, le caricatural ou le mystique ?
De ces impressions naît un mélange bizarre de peur, de recul et de pitié. L’adulte est un être violent qui pousse malgré soi l’enfant (l’esprit simple) à se muer en psychologue. C’est qu’on voudrait savoir quelle hystérie ou quelle douleur le pousse si loin dans la méprise : a-t-il perdu la vue en route ? Qui lui a crevé les yeux ?
______
Peter Pan et le Petit Prince sont fascinants. Pour l’enfant que je suis, pour ces rares adultes qui fouillent encore la poubelle de leurs miracles. Combien drôles, ces titans gauches ou ces chiffons, grandes choses laides d’adultes, vues par les yeux de James Barry : mon imaginaire, mon étoile rigolote : hors de toi ils tombent ! Saint Exupéry : je promène mes savates de huit ans dans vos mycoses. Mes amis, comme j’aurais parlé avec vous. Si j’avais connu votre rire !
Pour revenir aux deux vérités (l’enthousiasme et le cœur), j’ai remarqué deux choses amusantes. L’adulte a soit la défaite complaisante, soit la victoire à la Pyrrhus. Du premier, pauvre gourde qui, par excès anticipé de joie, se retrouve bête ; le truc ‘vie’ est drôle tant qu’on le rend drôle. Rien n’arrive drôle tout seul. L’enfant désordonné fait des bêtises et nourrit lui-même l’enthousiasme d’en faire.
Du second qui, samouraï, se blinde le bide de culture, de choses savantes et de dictons ; et qui, cerveau mastodonte ivrogne, déchire, écrase tout ce qui se présente. L’intelligence ni le cynisme, même enthousiastes, ne font l’enfant. Les bulldozers sont adultes, car violents.
De ces profils naît une première réponse. L’incapacité de faire des bêtises (l’absence d’enthousiasme), la complaisance dans l’échec, la violence aveugle (le manque de cœur) : ces symptômes engendrent le monstre que je hais. Il est, rappelle-toi, brûlant et glacé ; vicieux et brutal, parce que faible ; et rigoureux, méticuleux, comme l’horloge qu’il vomit.
___________
Pourtant, l’enfant d’enthousiasme et de cœur n’est pas simple. Je crois qu’il a simplement compris que le temps Adulte n’est pas fait pour lui. Il construit le rêve béat d’un monde ; il tire la langue, mange ses crottes de nez et savoure, quand il en a l’occasion, la douceur d’une langue sur la sienne. Avec il crée, et il s’en va. Le trait est sans fioriture, mais droit ; pas rigoureux, pas méticuleux. Droit d’enthousiasme et d’amour.
De cette droiture simple (comme tes dessins, bestiole) j’ai tiré la troisième histoire fascinante : Don Quichotte. Cervantes dit : nous sommes deux embarqués sur un âne, et on tape sur des moulins. L’amour d’une liberté totale, et absurde ; le choix idiot et merveilleux de péter la gueule aux pyramides, avec des épées en bois. Ici c’est l’enfant : droit d’enthousiasme et d’amour.
De cette idée naît une seconde réponse : l’adulte ne serait qu’à plaindre. On repense au Petit Prince et au despote : le pouvoir qu’il s’invente, alors que l’enfant veut partir, de lui en avoir donné l’ordre. Il est possible que cette grosse entité bigleuse ait été si abîmée par le truc ‘vie’ qu’elle se mette à se conduire comme lui : elle ‘dispose’. Les enfants lui sont assujettis, malgré leur absence de choix conscient à l’être. Elle pallie à sa débilité en s’inventant un règne.
Il y a là l’injustice d’une subordination (soi-disant) innée du rêve à l’algorithme du Monde Adulte. Subordination d’autant plus anormale que des enfants crient chaque jour à l’injustice, et pointent un doigt rigolard vers les dramaturges en cravates.
Z 12 09 11
Il y a un problème pour l’adulte. Il est difficile d’analyser ce que, par dégoût, par refus ‘inné’, l’on rejette ; pourtant c’est l’adulte qui m’intéresse. Il me fascine autant qu’il me répugne. Est-ce là le premier pas, le drôle ?
Il y a eu de nombreuses tentatives ; peut-être une révolution. Les adultes, rappelle-toi, avancent casqués. On croirait l’enclume sur le monde, tant la chose est lourde, défigurée. Elle traîne, comme le chien du village, des casseroles pleines de larmes. Une certitude émerge : la plupart du Monde Adulte consiste à fractionner. Le temps pour l’argent, le temps pour les ‘tâches quotidiennes’ ; le temps pour l’amour et le rire, s’il en reste.
De cette certitude, un constat : s’il fallait comme en Droit une pyramide, celle du Monde Adulte est dans le mauvais sens. Bien sûr, il n’en faudrait pas. J’envisage comme une drôle de monstruosité cette manie des ‘sections’ : le truc ‘vie’ n’est pas une carte d’Etat major.
Le réel problème (déclencheur) restant celui-là : l’adulte est-il plus ou moins que l’enfant ?
Je sais qu’il ne m’inspire qu’une sorte d’horreur ou de pitié, mais l’un ou l’autre changerait la donne. La première impression est telle : un bloc de métal froid où se greffent, au hasard des douleurs et des décennies, d’autres pièces brûlantes destinées à refroidir. La chose est gigantesque, cul en terre, Assise : j’ignore si elle s’engonce ou déborde.
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Avant la seconde impression, il faut que je précise mon sens de l’enfant. L’enfant n’est pas défini par la pyramide Adulte – comme faisant partie d’une ‘section de temps’. Dès qu’il en prend conscience, il conserve en combattant ses deux vérités : l’enthousiasme et le cœur. L’enfant s’engouffre dans la joie, la douleur et le truc ‘vie’, et s’engouffre de la même façon dans leur fin. Il est vivant : en désordre.
Il est probable que le Monde Adulte ne connaît pas les petits-déjeuners à minuit, les herbes à rêves, les étoiles filantes ; tout ceci échappe au grand Disque dur. Le truc ‘vie’ est exactement hors des cartes d’Etat major.
Par là se trouve la seconde impression : de petits embryons jonchant une plaine. Privé d’enthousiasme et de cœur, l’adulte erre nu : paralytique algorithmé, prisonnier d’une morale-éthique ridicule. Qu’en faire, de cet ersatz d’enfant si vieux qu’il sombre (par hasard) dans l’hideux, le caricatural ou le mystique ?
De ces impressions naît un mélange bizarre de peur, de recul et de pitié. L’adulte est un être violent qui pousse malgré soi l’enfant (l’esprit simple) à se muer en psychologue. C’est qu’on voudrait savoir quelle hystérie ou quelle douleur le pousse si loin dans la méprise : a-t-il perdu la vue en route ? Qui lui a crevé les yeux ?
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Peter Pan et le Petit Prince sont fascinants. Pour l’enfant que je suis, pour ces rares adultes qui fouillent encore la poubelle de leurs miracles. Combien drôles, ces titans gauches ou ces chiffons, grandes choses laides d’adultes, vues par les yeux de James Barry : mon imaginaire, mon étoile rigolote : hors de toi ils tombent ! Saint Exupéry : je promène mes savates de huit ans dans vos mycoses. Mes amis, comme j’aurais parlé avec vous. Si j’avais connu votre rire !
Pour revenir aux deux vérités (l’enthousiasme et le cœur), j’ai remarqué deux choses amusantes. L’adulte a soit la défaite complaisante, soit la victoire à la Pyrrhus. Du premier, pauvre gourde qui, par excès anticipé de joie, se retrouve bête ; le truc ‘vie’ est drôle tant qu’on le rend drôle. Rien n’arrive drôle tout seul. L’enfant désordonné fait des bêtises et nourrit lui-même l’enthousiasme d’en faire.
Du second qui, samouraï, se blinde le bide de culture, de choses savantes et de dictons ; et qui, cerveau mastodonte ivrogne, déchire, écrase tout ce qui se présente. L’intelligence ni le cynisme, même enthousiastes, ne font l’enfant. Les bulldozers sont adultes, car violents.
De ces profils naît une première réponse. L’incapacité de faire des bêtises (l’absence d’enthousiasme), la complaisance dans l’échec, la violence aveugle (le manque de cœur) : ces symptômes engendrent le monstre que je hais. Il est, rappelle-toi, brûlant et glacé ; vicieux et brutal, parce que faible ; et rigoureux, méticuleux, comme l’horloge qu’il vomit.
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Pourtant, l’enfant d’enthousiasme et de cœur n’est pas simple. Je crois qu’il a simplement compris que le temps Adulte n’est pas fait pour lui. Il construit le rêve béat d’un monde ; il tire la langue, mange ses crottes de nez et savoure, quand il en a l’occasion, la douceur d’une langue sur la sienne. Avec il crée, et il s’en va. Le trait est sans fioriture, mais droit ; pas rigoureux, pas méticuleux. Droit d’enthousiasme et d’amour.
De cette droiture simple (comme tes dessins, bestiole) j’ai tiré la troisième histoire fascinante : Don Quichotte. Cervantes dit : nous sommes deux embarqués sur un âne, et on tape sur des moulins. L’amour d’une liberté totale, et absurde ; le choix idiot et merveilleux de péter la gueule aux pyramides, avec des épées en bois. Ici c’est l’enfant : droit d’enthousiasme et d’amour.
De cette idée naît une seconde réponse : l’adulte ne serait qu’à plaindre. On repense au Petit Prince et au despote : le pouvoir qu’il s’invente, alors que l’enfant veut partir, de lui en avoir donné l’ordre. Il est possible que cette grosse entité bigleuse ait été si abîmée par le truc ‘vie’ qu’elle se mette à se conduire comme lui : elle ‘dispose’. Les enfants lui sont assujettis, malgré leur absence de choix conscient à l’être. Elle pallie à sa débilité en s’inventant un règne.
Il y a là l’injustice d’une subordination (soi-disant) innée du rêve à l’algorithme du Monde Adulte. Subordination d’autant plus anormale que des enfants crient chaque jour à l’injustice, et pointent un doigt rigolard vers les dramaturges en cravates.
Z 12 09 11
Zlatko- MacadAccro
- Messages : 1621
Date d'inscription : 30/08/2009
Age : 33
Localisation : Centre
re
Il y a beaucoup à dire ici. La force de la voix tout d'abord. Puissante, précise. Ensuite il y a cet essai qui a su saisir l'évidence. Avant c'était la vie, après il n'y a plus rien.
Le monde d'orient celui de l'enfance s'oppose au monde d'occident représenté par les adultes. Mais la symbolique va plus loin, ici deux shémas de pensée sont oscultés.
D'abord celui d'une intelligence instinctive dite primitive, de joie pure, d'élans sacrés en harmonie avec les forces de la nature-C'est l'esprit de l'enfance qui la possède.
Enfin une intelligence froide, calculatrice, habitée par le chiffre puis hantée par l'argent.
Une intelligence repressive dite raisonnée obscurcie par les fables, les contes de fées, les superstitions, les mythes et les légendes et de surcroît éloignée de l'environnement naturel. C'est l'esprit de l'adulte d'occident qui ne ressemble en rien à celui du sage, du guerrier de l'orient. Le premier a perdu son sixième sens, ce lien unique avec le réel authentique. Le second entretient des relations mystiques avec les forces de l'univers.
Oui, il y a de la glace dans le coeur de ces hommes là, les derniers selon Nietzsche.
La chose est gigantesque, cul en terre, Assise : j’ignore si elle s’engonce ou déborde.
Et oui il faut croire qu'elle s'engonce et grince toute la journée ! Quel triste spectacle !
A la lecture de cet essai, un seul mot d'ordre : Continuons la lutte pour ne pas devenir adulte ! Continuons à créer !
Le monde d'orient celui de l'enfance s'oppose au monde d'occident représenté par les adultes. Mais la symbolique va plus loin, ici deux shémas de pensée sont oscultés.
D'abord celui d'une intelligence instinctive dite primitive, de joie pure, d'élans sacrés en harmonie avec les forces de la nature-C'est l'esprit de l'enfance qui la possède.
Enfin une intelligence froide, calculatrice, habitée par le chiffre puis hantée par l'argent.
Une intelligence repressive dite raisonnée obscurcie par les fables, les contes de fées, les superstitions, les mythes et les légendes et de surcroît éloignée de l'environnement naturel. C'est l'esprit de l'adulte d'occident qui ne ressemble en rien à celui du sage, du guerrier de l'orient. Le premier a perdu son sixième sens, ce lien unique avec le réel authentique. Le second entretient des relations mystiques avec les forces de l'univers.
Oui, il y a de la glace dans le coeur de ces hommes là, les derniers selon Nietzsche.
La chose est gigantesque, cul en terre, Assise : j’ignore si elle s’engonce ou déborde.
Et oui il faut croire qu'elle s'engonce et grince toute la journée ! Quel triste spectacle !
A la lecture de cet essai, un seul mot d'ordre : Continuons la lutte pour ne pas devenir adulte ! Continuons à créer !
léo- MacadAccro
- Messages : 1224
Date d'inscription : 25/03/2010
Age : 40
Localisation : Nord
Re: les dramaturges en cravates.
Je regrette un peu cette commodité commune que tu emploies, ce grand Disque dur. Tu vaux mieux que ça, que ce raccourci binaire et monolithique employé à tour de bras et de phrases par les décérébrés lexicaux.
Mais bon, tu compenses largement avec cette belle définition du vivant
Il est vivant : en désordre
Qui me fascine sans doute parce que je me vois comme un de ces rares adultes qui fouillent encore la poubelle de leurs miracles.
Et même si j'ai l'intuition - expérimentale - que tu te trompes dans ta conclusion quant à l'injustice j'aime à croire que
des enfants [] pointent un doigt rigolard vers les dramaturges en cravates.
Nilo, grand enfant.
Mais bon, tu compenses largement avec cette belle définition du vivant
Il est vivant : en désordre
Qui me fascine sans doute parce que je me vois comme un de ces rares adultes qui fouillent encore la poubelle de leurs miracles.
Et même si j'ai l'intuition - expérimentale - que tu te trompes dans ta conclusion quant à l'injustice j'aime à croire que
des enfants [] pointent un doigt rigolard vers les dramaturges en cravates.
Nilo, grand enfant.
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... Tu lui diras que je m'en fiche. Que je m'en fiche. - Léo Ferré, "La vie d'artiste"
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