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Comme des miettes avec la main...fragment 3
4 participants
Macadam :: MacadaTextes :: Poèmes
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Comme des miettes avec la main...fragment 3
Fragment 3
Le spectre de la grande boucherie ne s'effacera pas,
Ni le goût de la boue en courant les bois,
Ni celui de la pluie, de l'internat comme une accoutumance,
Ni l'odeur de l'humus
Et la pelle et la pioche pour creuser le chemin nouveau,
Ni les arbres, les coteaux qu'ils couvrent
Et les ruisseaux qu'ils cachent.
Ni même les châteaux:
A Lizy, dans l'Aisne, s'en dresse un où le 4 janvier 1971
S'enchaînait un destin d'éducateur
Sur les traces de Fernand Deligny,
Après la lecture naïve et passionnée de « Graine de Crapule ».
Hitler aurait servi comme brancardier
Dans ce manoir occupé comme hôpital de campagne
Et l'Ailette, au dire des anciens,
Charriait son eau rougie de sang au plus fort des corps à corps.
Le Chemin des Dames est voisin
Où souffle incessant le vent sur une crête chauve.
Il lui faudra passer encore et encore avant de balayer
La poussière des milliers d'âmes meurtries
De boue, d'hivers, de gaz, d'éclats, de balles et de baïonnettes.
Les champs d'horreur ont repris leur destin nourricier,
Mais de la terre en labour émergent toujours les traces guerrières,
Lèvres blanches des cratères, obus et bombes
Que des trains lourds vont faire éclater loin.
L'affrontement avec les enfants blessés
Par d'autres conflits destructeurs
Fut un corps à corps avec les peurs intérieures
Dans un foyer qui n'avait que le nom d'« éducatif ».
Les adultes y défilaient plus vite que les adolescents
Et l'accueil y régnait à l'envers avec des règles résumées à une jungle:
Le plus grand, le plus fort, le plus malin imposait l'arbitraire
Quelquefois teinté de perversion, toujours de violence.
Le novice sensé encadrer le groupe devait s'y faire
Ou partir.
Au refus de cette alternative s'est engagé un combat. Seul.
A chacun d'asseoir une autorité, peu importe les moyens.
Un combat à deux fronts: face aux enfants, à leur souffrance agressive,
Et aux adultes dévoyés, un combat de tranchée.
Il y eut ainsi deux Claude.
Le premier s'étala enivré aux pieds des garçons,
Ils le dépouillèrent comme une indignité.
Il allait aussi à « l'Etape », faire gicler le champagne et sa paye
Auprès de filles nues jouant leur Casque d'Or et vengeant un dépit ravageur.
La culpabilité demeura et le regard haineux des adultes complices,
Pour lui avoir nommé la limite franchie,
Et provoqué l'exclusion.
L'autre Claude, violent de la maltraitance subie,
Intolérant à la frustration,
Lança une bouteille comme une grenade
Et une arcade resta marquée à vie.
Elle clignota tous les matins d'après devant le miroir,
Et redit chaque jour son histoire.
Il ne put en vouloir à l'enfant, sachant qu'il réglait des comptes
A d'autres: les parents absents,
Ils s'expliquèrent et ce Claude là s'excusa et devint vivable.
Lequel fut le plus digne, de l'enfant chiffonné ou de l'adulte exclus?
A en croire les collègues, il aurait fallu jeter le plus jeune.
Et l'histoire, tous les jours d'après, dessina l'autorité.
Une présence attentive et ferme sur la loi,
Une loi apparentée à l'amour plus qu'au statut,
Et exigeant l'exemple.
Le reste appartient à l'enfant qui s'apprivoise un peu à la fois
Ou reste en cage derrière ses barreaux de désamour.
Sa décision tient parfois du mystère et du jeu de dés.
Et celle de continuer la tâche a tenu de l'acharnement à être digne,
Et disponible
Pour tous ceux-là qui lui ont appris l'important à quoi tiennent
L'amour et les liens.
Le spectre de la grande boucherie ne s'effacera pas,
Ni le goût de la boue en courant les bois,
Ni celui de la pluie, de l'internat comme une accoutumance,
Ni l'odeur de l'humus
Et la pelle et la pioche pour creuser le chemin nouveau,
Ni les arbres, les coteaux qu'ils couvrent
Et les ruisseaux qu'ils cachent.
Ni même les châteaux:
A Lizy, dans l'Aisne, s'en dresse un où le 4 janvier 1971
S'enchaînait un destin d'éducateur
Sur les traces de Fernand Deligny,
Après la lecture naïve et passionnée de « Graine de Crapule ».
Hitler aurait servi comme brancardier
Dans ce manoir occupé comme hôpital de campagne
Et l'Ailette, au dire des anciens,
Charriait son eau rougie de sang au plus fort des corps à corps.
Le Chemin des Dames est voisin
Où souffle incessant le vent sur une crête chauve.
Il lui faudra passer encore et encore avant de balayer
La poussière des milliers d'âmes meurtries
De boue, d'hivers, de gaz, d'éclats, de balles et de baïonnettes.
Les champs d'horreur ont repris leur destin nourricier,
Mais de la terre en labour émergent toujours les traces guerrières,
Lèvres blanches des cratères, obus et bombes
Que des trains lourds vont faire éclater loin.
L'affrontement avec les enfants blessés
Par d'autres conflits destructeurs
Fut un corps à corps avec les peurs intérieures
Dans un foyer qui n'avait que le nom d'« éducatif ».
Les adultes y défilaient plus vite que les adolescents
Et l'accueil y régnait à l'envers avec des règles résumées à une jungle:
Le plus grand, le plus fort, le plus malin imposait l'arbitraire
Quelquefois teinté de perversion, toujours de violence.
Le novice sensé encadrer le groupe devait s'y faire
Ou partir.
Au refus de cette alternative s'est engagé un combat. Seul.
A chacun d'asseoir une autorité, peu importe les moyens.
Un combat à deux fronts: face aux enfants, à leur souffrance agressive,
Et aux adultes dévoyés, un combat de tranchée.
Il y eut ainsi deux Claude.
Le premier s'étala enivré aux pieds des garçons,
Ils le dépouillèrent comme une indignité.
Il allait aussi à « l'Etape », faire gicler le champagne et sa paye
Auprès de filles nues jouant leur Casque d'Or et vengeant un dépit ravageur.
La culpabilité demeura et le regard haineux des adultes complices,
Pour lui avoir nommé la limite franchie,
Et provoqué l'exclusion.
L'autre Claude, violent de la maltraitance subie,
Intolérant à la frustration,
Lança une bouteille comme une grenade
Et une arcade resta marquée à vie.
Elle clignota tous les matins d'après devant le miroir,
Et redit chaque jour son histoire.
Il ne put en vouloir à l'enfant, sachant qu'il réglait des comptes
A d'autres: les parents absents,
Ils s'expliquèrent et ce Claude là s'excusa et devint vivable.
Lequel fut le plus digne, de l'enfant chiffonné ou de l'adulte exclus?
A en croire les collègues, il aurait fallu jeter le plus jeune.
Et l'histoire, tous les jours d'après, dessina l'autorité.
Une présence attentive et ferme sur la loi,
Une loi apparentée à l'amour plus qu'au statut,
Et exigeant l'exemple.
Le reste appartient à l'enfant qui s'apprivoise un peu à la fois
Ou reste en cage derrière ses barreaux de désamour.
Sa décision tient parfois du mystère et du jeu de dés.
Et celle de continuer la tâche a tenu de l'acharnement à être digne,
Et disponible
Pour tous ceux-là qui lui ont appris l'important à quoi tiennent
L'amour et les liens.
Dernière édition par gerard hocquet le Sam 31 Oct - 21:43, édité 1 fois
gerard hocquet- MacadAdo
- Messages : 194
Date d'inscription : 24/10/2009
Re: Comme des miettes avec la main...fragment 3
que de souffrances !!!!
et pourtant, dans d'autres textes, que de joies reçues en contemplant la Nature ...
Yzaé, sous la table ...
et pourtant, dans d'autres textes, que de joies reçues en contemplant la Nature ...
Yzaé, sous la table ...
Yzaé- MacadAccro
- Messages : 696
Date d'inscription : 07/10/2009
Age : 65
Localisation : touraine
Re: Comme des miettes avec la main...fragment 3
Te lire c'est faire une plongée dans la vie.
Chacune de tes "miettes" est un pain entier, posé là sur la table pour rassasier le lecteur de ces choses simples et puissantes que tu lui offres.
Moi, depuis que j'y ai goûté je ne peux m'en passer.
Nilo, apprenti mitron.
Chacune de tes "miettes" est un pain entier, posé là sur la table pour rassasier le lecteur de ces choses simples et puissantes que tu lui offres.
Moi, depuis que j'y ai goûté je ne peux m'en passer.
Nilo, apprenti mitron.
_________________
... Tu lui diras que je m'en fiche. Que je m'en fiche. - Léo Ferré, "La vie d'artiste"
Re: Comme des miettes avec la main...fragment 3
merci à vous deux. Je me remets au pétrin.
gerard hocquet- MacadAdo
- Messages : 194
Date d'inscription : 24/10/2009
Re: Comme des miettes avec la main...fragment 3
Ce troisième fragment est, comme les autres, une des pierres du Mur à Dédé.
Aujourd'hui ça tombe sur lui, pour les autres il faudra attendre une autre fois.
Mais ce n'est pas une raison pour se priver d'une relecture.
Nilo, pierre à l'édifice.
Aujourd'hui ça tombe sur lui, pour les autres il faudra attendre une autre fois.
Mais ce n'est pas une raison pour se priver d'une relecture.
Nilo, pierre à l'édifice.
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... Tu lui diras que je m'en fiche. Que je m'en fiche. - Léo Ferré, "La vie d'artiste"
Re: Comme des miettes avec la main...fragment 3
Le mur me ramène encore à tes miettes...
Elles veulent subsister !
Elles veulent subsister !
_________________
LaLou
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