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Résister
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Macadam :: MacadaTextes :: Poèmes
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Résister
Résister
J’avais deux mois, mes mains et mes lèvres étaient bleues : je ne respirais plus. On ne parlait pas de respiration artificielle en 1957, alors mon père avait tout tenté : il m’avait pris les pieds dans une main, l’autre tenant mon dos, il a imprimé à mon petit corps des mouvements rapides vers le haut, afin de forcer l’air à entrer dans mes poumons. Ma mère m’a dit que j’avais recommencé à respirer à la troisième reprise. J’avais ensuite dormi sur la poitrine de ma mère, pendant un mois entier, au cas où : j’avais contracté la coqueluche.
J’ai entendu cette histoire des tas de fois, mais aujourd’hui cet épisode me donne envie de pleurer, comme si je ressentais toute la panique qui avait gagné mes parents. Mon père m’a sauvé la vie, ma mère a fait en sorte de la conserver…
Aujourd’hui, bien que je ne comprenne pas toujours le comment ni le pourquoi, je suis persuadée que le cours de ma vie s’est décidé à partir de ce moment-là.
l’odeur de l’enfance…
tes yeux sur moi me bordent
d’amour anxieux
gris-bleu de ciel nébuleux
souvenirs d’avant l’âge
résister à la mort
ses yeux marron
qui cherchent l’air pour moi
inspirer, expirer
avant l’âge de se souvenir
Qu’aurais-je à dire de moi-même? Rien, sinon que je suis, comme bien d’autres, « une survivante », tout, puisque je dois toujours fournir un effort gargantuesque pour m’exprimer. Rien, sinon qu’il me semble que ce mur entre moi et les autres est toujours aussi difficile à traverser, tout, car «jamais deux sans trois », c’est ce qu’avait dû se dire mon père après m’avoir arrachée à la mort à la troisième tentative.
Rien, sinon que le troisième accident vasculaire cérébral (avc), s’est souvenu de cette expression…!
La première fois que j’ai été touchée, j’étais si étourdie que je me tenais le long des murs pour me déplacer et je ne dormais qu’avec un bras ou une jambe qui pendait du lit. Toutefois, bientôt on n’en parla plus, car quelques mois plus tard je semblais remise. Accident mineur, tellement qu’il est passé inaperçu dans mon histoire médicale. J’avais alors 29 ans, c’était mon premier avertissement…
Après quelque temps, pendant lequel il se passa beaucoup de choses (un divorce déchirant, des études, rencontres avec un psy, travail, aide sociale, etc.), j’entrai à l’université du Québec à Chicoutimi. En 1996, je terminai mon baccalauréat en enseignement du français. C’est à ce moment que j’eus mon second avc : le 27 décembre, quatorze jours après avoir terminé mon bac.
Cette fois, j’ai perdu tous mes repères et mes efforts furent vains pour me relever après ma chute. Le TACO a révélé une lésion aiguë à gauche, accompagnée de la cicatrice qu’avait laissée mon « ancien avc », au cervelet gauche. Dire que j’ai eu longtemps des problèmes d’équilibre ne me semble pas exagéré. Avertissement numéro deux.
Cependant, c’est ma psychose, effet secondaire de l’avc, pour lequel j’ai encore été hospitalisée deux mois de plus, qui a laissé une blessure indélébile à ma fille et bien sûr à moi-même…
La télé me regarde
je dois être sage
ne pas parler
ne pas bouger inutilement
je dois sortir d’ici
sans qu’elle ne s’en aperçoive
sans qu’ils ne s’en aperçoivent
il y a une porte secrète dans l’autre pièce
mais je ne l’ai pas encore trouvée
il y a plein de passages secrets ici
je le sais, ils n’ont pas encore compris que je sais
mais je sais partir sans que l’œil de la télé ne me voie
il suffit que je sois absente quelque temps
à sa droite
pour qu’elle m’oublie
mais je dois ramper sous son œil pour m’enfuir
ne rien laisser dépasser, pas même un cheveu
revenir pour vérifier si la porte secrète est réapparue
non, toujours rien
je l’ai vue une fois, pourtant
il me reste la salle de bain
le commutateur me fait changer d’étage
c’est un ascenseur
pour la liberté
pourtant,
je ne sais où je me trouve ensuite
je marche et je marche des heures durant sans trouver ma chambre
c’est vrai ! j’ai changé d’étage
mais pourquoi y a-t-il encore une baie vitrée
pourquoi n’y a-t-il pas de porte de sortie ?
il y a un chemin assez complexe, de la pièce du fumoir à la salle de bain,
à une des chambres du bout, pour revenir vers le fumoir
mais je manque de vitesse
si j’étais plus rapide
on ne me verrait pas
et je pourrais passer de l’autre côté…
je pourrais m’enfuir…
mais je marche, je marche des heures durant sans trouver ma chambre.
Je ne parlerai pas beaucoup de ma troisième expérience, sans doute
parce que les mots étaient alors rares: physiothérapie, ergothérapie, psycho neurologie et orthophonie étaient au rendez-vous pour me soutenir. À dix ans d’intervalle, 1986, 1996 et 2006 furent des années charnières entre le début et la fin d’une étape. C’est ainsi que j’ai commencé une deuxième vie, le premier janvier 2007, après que mon hémorragie cérébrale impossible à opérer, m’ait laissé beaucoup moins de mots…
Laissez-moi me cacher derrière ces mots imprononçables
cette gêne audible qui déchire vos tympans
le fond de ma peine ne trouve pas mes larmes
ne me parlez pas !
je serais tentée de vous répondre
et vous seriez obligés d'entendre
cette gêne audible qui déchire vos tympans
le fond de ma peine ne trouve pas mes larmes
ne me parlez pas !
je serais tentée de vous répondre
et vous seriez obligés d'entendre
ce ne sera pas moi
aujourd'hui, je ne suis rien
rien qu'un effort gargantuesque
pour prononcer ces mots que je ne dis pas
ne m'écoutez pas
vous pourriez avoir pitié
oubliez-moi, parlez que je vous écoute
que j'entende cette musique
chaque mot, un mouvement
chaque phrase, une symphonie
que je ne jouerai plus
je suis discordante.
Aujourd’hui, après avoir enseigné à Québec à l’éduction des adultes aux Centres St-Louis et Louis-Joliet, il me reste encore le goût de vivre, celui de communiquer ce que je pense, ce que je suis. Je me suis remise à l’écriture, malgré ma « légère aphasie », et c’est l’amour que je porte à ma fille et celui que ma famille a pour moi, qui fait que cette facilité à m’exprimer m’aide encore chaque jour à « Résister » au Silence et à la mort de la Vie en moi…
Chantal Racine
printemps d'avril- MacadMalade
- Messages : 357
Date d'inscription : 09/01/2011
Age : 67
Localisation : québec au québec
Re: Résister
Un poème avec des extraits vraiment forts en émotion :
"
"
l’odeur de l’enfance…
tes yeux sur moi me bordent
d’amour anxieux
gris-bleu de ciel nébuleux
souvenirs d’avant l’âge "
Une histoire de vie, "ton histoire" et ce qui a fait de toi, ce que tu es aujourd'hui.
Puis ces mots, tes mots que je qualifierais de "magique" parce qu'ils viennent du fond de ton ressenti ,
qu'ils sont vrais et je les respecte d'autant + .
ce ne sera pas moi
aujourd'hui, je ne suis rien
rien qu'un effort gargantuesque
pour prononcer ces mots que je ne dis pas
ne m'écoutez pas
vous pourriez avoir pitié
oubliez-moi, parlez que je vous écoute
que j'entende cette musique
chaque mot, un mouvement
chaque phrase, une symphonie
que je ne jouerai plus
je suis discordante."
Une histoire de vie, "ton histoire" et ce qui a fait de toi, ce que tu es aujourd'hui.
Puis ces mots, tes mots que je qualifierais de "magique" parce qu'ils viennent du fond de ton ressenti ,
qu'ils sont vrais et je les respecte d'autant + .
" Laissez-moi me cacher derrière ces mots imprononçables
cette gêne audible qui déchire vos tympans
le fond de ma peine ne trouve pas mes larmes
ne me parlez pas !
je serais tentée de vous répondre
et vous seriez obligés d'entendre
le fond de ma peine ne trouve pas mes larmes
ne me parlez pas !
je serais tentée de vous répondre
et vous seriez obligés d'entendre
ce ne sera pas moi
aujourd'hui, je ne suis rien
rien qu'un effort gargantuesque
pour prononcer ces mots que je ne dis pas
ne m'écoutez pas
vous pourriez avoir pitié
oubliez-moi, parlez que je vous écoute
que j'entende cette musique
chaque mot, un mouvement
chaque phrase, une symphonie
que je ne jouerai plus
je suis discordante."
La vie parfois ne nous semble pas être comme on l'aurait voulu..OUI mais
chère poètesse, belle poètesse, tu ne serais pas ce que tu es aujourd'hui . Ta personnalité, ton choix qui devait correspondre à tes "faiblesses" , à tes "douleurs,
Comme ytu l'as si bien dit : Ta vie a commencé à se souvenir quand la mort était trop proche.
Mais je voulais aussi te dire, que tu as une belle écriture avec des mots qui touchent et qui ont leur place.
Aujourd'hui, même si la lutte parait sans fin, elle est nécessaire pour encore avancer.
L'art est un moyen de surmonter les épreuves trop lourdes ( je sais et c'est pour cela que j'ose le dire)
On peint sa vie.
Un cadeau pour ton anniversaire :
Il aurait voulu prendre un coeur
Il aurait voulu te voir sous son aile
mais des bras puissants ont chassé le corbeau
la faux et le manteau.
Il n'est point l'heure
Il n'est l'heure de sonner
Il n'est pas l'heure de sonner le gla
Il n'est pas l'heure disait il !
Et le petit bout de femme est debout
Face contre sa vie
Les larmes soulagent
Le souffle sauve
Un combat que tu as gagné
BON ANNIVERSAIRE poètesse
Et on se dit
RDV pour un an de + à chacune
( j'en ai pris un y a 25j mais je m'en suis sortie heureuse, heureuse de voir encore
ce que le magnifique printemps d'Avril offre )
MERCI de ce partage
chère poètesse, belle poètesse, tu ne serais pas ce que tu es aujourd'hui . Ta personnalité, ton choix qui devait correspondre à tes "faiblesses" , à tes "douleurs,
Comme ytu l'as si bien dit : Ta vie a commencé à se souvenir quand la mort était trop proche.
Mais je voulais aussi te dire, que tu as une belle écriture avec des mots qui touchent et qui ont leur place.
Aujourd'hui, même si la lutte parait sans fin, elle est nécessaire pour encore avancer.
L'art est un moyen de surmonter les épreuves trop lourdes ( je sais et c'est pour cela que j'ose le dire)
On peint sa vie.
Un cadeau pour ton anniversaire :
Il aurait voulu prendre un coeur
Il aurait voulu te voir sous son aile
mais des bras puissants ont chassé le corbeau
la faux et le manteau.
Il n'est point l'heure
Il n'est l'heure de sonner
Il n'est pas l'heure de sonner le gla
Il n'est pas l'heure disait il !
Et le petit bout de femme est debout
Face contre sa vie
Les larmes soulagent
Le souffle sauve
Un combat que tu as gagné
BON ANNIVERSAIRE poètesse
Et on se dit
RDV pour un an de + à chacune
( j'en ai pris un y a 25j mais je m'en suis sortie heureuse, heureuse de voir encore
ce que le magnifique printemps d'Avril offre )
MERCI de ce partage
Re: Résister
Bouleversant.Une pierre invisible traverse le monde mais chacun la voit.A sa propre dimension.
Nous ne ferons rien d'autre que poignarder la vie
Luis Cernuda
Re: Résister
Je ne sais quoi répondre après un tel commentaire, Sylvie ! Il me semble si flatteur....
Merci pour ton cadeau d'anniversaire que tu as écris juste pour moi ?
Pour tout ce qu e tu as écris, je te remercie infiniment !!!
Chantal, printempsd'avril
Merci pour ton cadeau d'anniversaire que tu as écris juste pour moi ?
Pour tout ce qu e tu as écris, je te remercie infiniment !!!
Chantal, printempsd'avril
printemps d'avril- MacadMalade
- Messages : 357
Date d'inscription : 09/01/2011
Age : 67
Localisation : québec au québec
Re: Résister
Merci Laura, j'adore ta pierre invisible qui traverse le monde...
Chantal
Chantal
printemps d'avril- MacadMalade
- Messages : 357
Date d'inscription : 09/01/2011
Age : 67
Localisation : québec au québec
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