Sors tes jouets si t’es un homme !

Il est assez tard, mais pas trop. Il paraît que c’est le « chien et loup », enfin s’il fallait croire tout ce que l’on raconte de bouche dans l’oreille, il y a belle lorette que nous aurions pris nos moulins à vent.
Tu n’as pas fini de les déterrer tes excavations pauvre Martin. A supporter non seulement tes accrocs journaliers mais ceux de tes voisins complaisants qui pissent sous tes fenêtres dans d’interminables sorties de queue lala.
Sans compter que l’abécédaire des jours file tranquillement sa mécanique parfaite qui n’a rien à te dire.
« Qu’est-ce que mange-t-on ce soir chérie ? »
« Ta gueule, je déprime autour de mes furoncles ! Va t’acheter une parure surgelée au rayon frais… »
Il y court panier au bras ou roulette de sac à patates derrière lui, dans la longue file des ménagères de plus qui ont mis le temps à posséder le moins.
Il passe en sifflotant devant la boucherie épaisse et bien tranchées, évite la flaque coagulée , contourne la gueule morte des raies étalées sur le côté.
Quoi que, jeter un œil de biais à l’œil vitreux rappelle, sans avoir l’air d’y toucher , que tes écailles à toi serrent les fesses.
Saleté de vie.
Les cimetières sont pleins de vieux enfants qui ont bien rigolé en jouant avec leurs cerfs-volants fourrés à la crème, jupe en l’air culotte à l’envers, côté propre, au cas où « tu aurais un accident cochonne, tu veux pas qu’on te ramasse dans la rue, la culotte sale non ? »
M’en fiche, quand ils m’ont ramassée la jambe ouverte comme une cuisse de grenouille, je portais un pantalon na !
Vl’an dans tes dents de mégère neurasthénique.
Saleté de vie.
En ce moment, Martin descend dans ses caves personnelles sans cuvée spéciale, il furète avec sa lampe de poche, traque la toile d’araignée, le vieux débris oublié.
J’ai peur de ce qu’il va trouver qu’il ne réparera pas ; sur quoi il va lâcher toutes les eaux de ses barrages sans prévenir les gamins qui flânent encore chez lui.
Il croit qu’il respirera mieux sur le seuil s’il rapporte ses petits joujoux déglingués comme le chien court après sa baballe à sens élastique.
Je me demande qui a pu lui fourrer ça dans la tête , sans doute un psychiatre payé à la pièce, ou un prestidigitateur.
Voilà c’est fini, le loup a bouffé le chien. Nous allons pantoufler dans la nuit ; je pense qu’il est l’heure de coucher mes poupées.

J'ai comme l'impression que Ratoune connait mes clients qui parlent groucho mordo de la même façon... mon ours en peluche, lui (pardon DEDE) il a été bouffé par les mitres... encore un sale coup du clergé...

Swann, en colère

Je dirai une prière pour ton ours !

Du bon Ratoune.
Ce personnage est attachant d'incongruité et de grossièreté.
Répugnant aussi et ce mélange nous mène au bout de la la lecture, au bout de la pièce, dans le noir où dorment les poupées.

Nilo, Grand Guignol.

C'est du Ratoune , du 100%, et je suis à chaque x perdue dans ce style. Ça me fait vraiment sourire, puis me désarçonne et enfin m'élève des sentiers battus jusqu'à me retrouver sur le quai fin, sans savoir comment j'y suis arrivée, par quel train? Voilà les sensations de lecture que m'ont provoqué ce texte.

PS; ce n'est pas pour me déplaire au contraire

Je réponds particulièrement à Comateen, non que j'ignore les autres lecteurs, loin de là mais son commentaire vient de me rappeler que je ne sais jamais dans quel train je suis montée, dans quelle direction, avec quel objectif.
Je suis à la gare, un train est à l'arrêt, je m'assieds dans la voiture z ou w, de préférence vide.
Pourquoi celui-là plutôt qu'un autre ? Je suppose que le chef de gare qui veille en nous, le sait lui. Toujours est-il que la plupart du temps le train me laisse en rase campagne, le conducteur souvent parti boire une bière à la ferme du coin, et je me retrouve à devoir rentrer à pied bien loin de mes pénates.
Pester contre la paresse des chauffeurs ne sert à rien et j'ai toujours une paire de chaussures dans mon sac à dos.

Une fois n'est pas coutume, j'aime beaucoup. Bien ficelé, enlevé, agréable, tout y est pour passer un bon moment. Plus de "sens", moi d'artifices.

Bravo.

Z.

Missing

Nilo, ce qui est fait n'est plus à faire.

Je re-commente pour deux raisons : d'abord parce que j'ai trouvé mon premier commentaire à côté de mon ressenti - en tout cas de l'actuel. La plume est agile et impertinente, l'humour grinçant fait mouche.

Ensuite parce que j'ai pris dans les dents la phrase qui parle de l'homme et de ses terreurs comme d'un chien courant après sa baballe : oui, mais.

Z.

Je l'avais oublié celui-là, merci aux lecteurs de l'avoir ressorti du " rayon frais ".

On dirait bien que je te connais ! La façon aguichante de tenir des propos pas du tout anodins...J'hésite quand même entre deux possibles... Mais J'AIME !

Les temps présents te donnent raison de ne pas avoir choisi aucun train...

Dam, force de trappe

J'ai fait le vœu de mettre mon aumône dans la sébile de tous les mendiants que je trouverai sous toutes les portes cochères qui mènent au Petit Etablissement de Crédit que je viens d'ouvrir au profit de ceux qu'en ont pas besoin. En particulier à la Cinquième liste que j'vous ai filée.
Juste histoire de pas avoir bossé pour rien à les chercher pasque si j'compte que sur vous j'crains qu'y en ait qu'entendent pas le son de votre obole tombant dans leur coupelle.
Charité bien ordonnée...

Dédé.