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La grande muette
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Macadam :: MacadaTextes :: Nouvelles
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La grande muette
Retour de blessure, le baromètre indique temps variable à maudit, après des études inaccomplies, je suis bel et bien sur la bonne voie, le chemin qui m’emmène jusqu’à faire de moi le raté parfait, en passe d’être consacré l’homme qui réussit le moins dans sa tête.
Deux mois dans la vie dite active, sociale, le véritable monde du travail. Chef de parking dans une usine, secteur production. Sous mes ordres, des bahuts énormes s’activent, chargés de haricots verts ou de tomates. A travers le prisme des heures supplémentaires, je découvre les bienfaits du discours solidaire, syndical. Tu vois, tout ça c’est pour moi et tout ça c’est pour toi. Enfin je touche le concret, je salis mes mains, disons le bout de mes doigts.
Cependant, je ne fais jamais le pas de trop, de peur d’être vu, ainsi de suite jusqu’à ce qu’on me remarque et m’ennuie. Mes collègues de travail me trouvent la mine sombre. Les ouvrières sont rêches, mal habillées, assez peu féminines à mon goût. De plus, ce trouble me donne la nausée : elles ont des ongles sales. Elles possèdent la parole facile,me lançant des gros mots à la pause casse-croûte, maternant le gentil petit étudiant. Alors, je me replie sur la secrétaire de l’accueil à l’administratif. Elle me donne le tournis chaque soir et j’écris des histoires où elle tient le premier rôle dans des positions plus ou moins salaces que lui imposent mon imagination débordante.
A l’ouest s’écouleront deux mois sans importance alors qu’à l’est ma vie allait prendre un essor nouveau.
En recevant ma convocation pour le service militaire, je tire un peu la gueule.
Allez, asseyez-vous, je m’appelle Michel Fourniret, enchanté, moi c’est Pierre Chanal.
Mourmelon, la Marne, son 51 sans anis, le froid, la neige, le vent, et puis quand la neige fond, la boue.
Cet hiver promet d’être rude et triste sur une partie de la France.
A cette époque, les séries américaines n’avaient pas encore inventé le terme « profiler ». C’est dommageable, surtout pour les victimes de Chanal qui ont disparues et qu’il a torturées, profitant du silence complice de l’armée et du confort lugubre, rustique, de son camping-car.
Puisque j’ai fait quelques études, dit-on, on me nomme vaguemestre, poste à responsabilités, qui correspond plus ou moins à un facteur dans le civil. Une jeep de fonction et mon chauffeur pour m’emmener chaque jour à la poste de cette ville barbelée.
Au cinquième régiment de dragons où Chanal se trouve, je crois l’avoir croisé une ou deux fois. Un type relativement banal, aussi banal que votre serviteur. Des années plus tard, je le croiserai à la télé en prime time. Vous faisant grâce des détails sordides qui accompagnaient tous ses crimes. Il fut un homosexuel refoulé comme l’armée sait si bien s’y prendre pour en générer. Dans son travail d’investigation, la police n’a pour ainsi dire bénéficié que d’une aide à contre cœur des hauts gradés.
La peur de trop secouer le cocotier et de voir se prendre sur la tête des trucs très lourds , des trucs qu’on sait déjà qu’on aura du mal à assumer.
La gente galonnée est d’une rigueur absolue , d’une droiture sans failles. Aussi, les homosexuels refoulés, on les a tous renvoyés chez eux avec perte et fracas. Ici, ce n’est que la bonne virilité bien assumée et de bon aloi, tous ces jeunes garçons qu’on forme, droits dans leurs rangers bien cirées à marcher au pas, faire leurs lits au carré, éventuellement défendre la France. Ce seront des hommes, des vrais qui traverseront les paysages où nul arbre ne repoussera après l’infernal bruit d’acier qu’engendre la chenille du char quand il se met en action et dévale les plaines de la Marne.
Pour ainsi dire, a cette époque- là, Mourmelon c’est une immense ville de garnison. Tellement peu de civils qu’en atteignant la ville tu as l’impression bizarre de sortir d’un enfermement pour entrer dans un autre. La grande rue principale, et ses dix ou quinze bars d’un côté, ses dix ou quinze bars de l’autre. L’effet miroir est stupéfiant. Au bout de cette rue, un cinéma porno où de joyeux driller viennent s’exciter sur des films bien franchouillards, aux titres ronflants, provocateurs, dans la plus grande tradition. Là-dedans, dans ce fourmillement de tenues militaires plus ou moins débraillées, ça gueule, ça se pousse du coude, et ça rigole. On se congratule, c’est d’une franche camaraderie. Certains, qui ont trop bu vraiment, parviennent non sans mal à se frayer un chemin jusqu’aux toilettes pour vomir, les autres, les plus maladroits, disons les moins rapides, gerbent à même la moquette tandis qu’en cinémascope hurlent des « Ah oui encore, vas-y…! ». C’est vraiment d’une franche camaraderie que ça en devient touchant. Il me souvient que le jour de la libération de notre contingent, les effluves de la veille avaient poussé un jeune appelé à grimper sur le toit locomotive. A cause de cet huluberlu, le train a pris quelque tard. Ils ont enfermé ses restes dans une petite boîte. D’après les témoins proches, une odeur de sardine grillée avait rendu l’air irrespirable.
…L’armée vous forme, vous instruit, elle vous apprend un tas de choses. L’alcool devient votre ami, précieux aide de camp, celui qui restera à vos côtés chaque jour que dieu fasse. L’alcool, gangrène sociale, qui vous obligera plus tard à battre votre femme afin qu’elle ferme sa grande gueule, vous laissant peinard à regarder le fameux match de foot à la télé.
Dans ce microcosme impuissant à créer des relations humaines dignes de ce nom, l’apprentissage de l’humiliation, de la solitude glacée d’une ville de garnison. Une solitude au milieu de cette faune, de ce tas d’immondes dégénérés, tel appelons-le, le lieutenant X.
Un bel homme, grand, bâti comme un chef de guerre, carnassier et fanatique, ses hobbies se résumant pour l’essentiel aux vieux chants très glamours, marqués IIIeme Reich.
L’ homo erectus , dans toute sa grandeur, que l’histoire a refoulé.
Et voilà soudain que le complexe du petit gros resurgit. Ce jour-là, séance de tir en rafales, au Famas s’il vous plaît. Depuis un bon moment le lieutenant X a choisi sa tête de turc, le bouc émissaire. Il en faut toujours un. La jeune recrue s’appelle Eric, il a dix neuf ans, joufflu, l’œil torve, d’ailleurs tout le monde s’amuse à le moquer sur son physique. La mobilité réduite de ses capacités intellectuelles permet au groupe de se défouler de ses peurs et de son ennui. Sans ménagement et sans les contraintes des lois civiles.
En plus d’être un petit gros, fonction sociale déjà difficile à assumer, il n’a pas trouvé de meilleur moyen que de mouiller ses draps le premier jour de l’incorporation. Alors depuis, il porte un surnom qui est agréable à entendre : « La pisse ». Devenu la risée de tout le monde, pour lui vous n’avez qu’à multiplier le parcours du combattant par dix et vous obtiendrez le résultat de l’opération facilement.
Sous les ordres du lieutenant, l’officier du pas de tir, nous nous présentons par rangées de cinq ou de six sous l’immense hangar et nous commençons le tir en rafales. En zig-zag les balles fusent, les chargeurs se vident. Des balles réelles comme à la guerre, un bruit métallique et assourdissant. Plus loin, à ma droite, une arme s’enraye. C’est le Famas du petit gros, évidemment. Tandis que nous continuons de tirer, lui se retourne, son arme toujours chargée en direction du lieutenant. Mesurant rapidement la situation, il se précipite sur lui, le désarme et le gifle magistralement.
Les mots fusent, sortent de sa bouche comme des balles en rafales :
– Espèce d’idiot, de con ! Crétin ! Débile !
La séance s’interrompt. Le lieutenant nous fait tous sortir du hangar et nous rassemble dans la forêt proche, sous un grand arbre. Il nous fait mettre en cercle. Il ordonne au petit gros de se déshabiller entièrement.
– Trente pompes pour commencer et à chaque fois que tu te relèves tu dis « J’enc..le ma mère ! J’enc..le ma mère ! »…
Alors que certains pouffent en silence, dans ma tête tout commence à sonner trop faux, trop fort. Ma gorge se serre, mon ventre me fait mal.
Aux prix d’efforts quasi surhumains le petit gros s’agite à effectuer les mouvements, le corps secoué de spasmes. De la morve coule de son nez jusqu’à ses lèvres.
Le ciel est gris. On dirait que l’orage monte.
Les atomes vont bientôt se rencontrer et la déferlante va se produire.
Le lieutenant tourne autour du corps nu en détresse comme s’il inspectait un morceau de viande, ce morceau de graisse qu’il étudie avec ses yeux froids et lubriques.
Je serre les dents si fort que mes lèvres saignent. Tout mon corps saigne.
« J’enc..le ma mère ! J’enc..le ma mère ! », à crescendo, ce mauvais rêve ne cessera donc jamais… !?
Le souffle coupé, le petit gros rassemble ses dernières forces puis s’affale sur le sol brûlant.
Le lieutenant tombe sa veste et se retrouve torse nu. Il est bâti en triangle, ses muscles sont luisants, ses biceps énormes.
– Allez ! On recommence, espèce de goret !
Il bombe le torse, s’adosse à l’arbre nonchalamment. A ses pieds, le visage gonflé du petit gros. Le lieutenant s’allume une cigarette et lui crache la fumée au visage.
Je sens la haine monter en moi et plutôt que de la compassion, je voudrais agir, un couteau entre les dents, lui couper les couilles et lui faire bouffer, mais je n’interviens pas. De là-haut, quelqu un m’observe et j’imagine qu’il n’est pas très fier de moi.
En plus d’être un raté, ce qui à fortiori n’est pas si grave que ça, je suis à présent devenu un lâche, un peureux, une couille molle...
Quelques jours plus tard, le sergent a retrouvé le petit gros pendu sous le même arbre qui avait servi de scénario à ce moment sordide. Jusqu’à la fin de mon armée, me rasant devant la glace, je n’ai jamais pensé à devenir président de la république, mais j’essayais d’éviter mon regard, la lame de rasoir passant de nombreuses fois si près de ma gorge sans m’atteindre…
Deux mois dans la vie dite active, sociale, le véritable monde du travail. Chef de parking dans une usine, secteur production. Sous mes ordres, des bahuts énormes s’activent, chargés de haricots verts ou de tomates. A travers le prisme des heures supplémentaires, je découvre les bienfaits du discours solidaire, syndical. Tu vois, tout ça c’est pour moi et tout ça c’est pour toi. Enfin je touche le concret, je salis mes mains, disons le bout de mes doigts.
Cependant, je ne fais jamais le pas de trop, de peur d’être vu, ainsi de suite jusqu’à ce qu’on me remarque et m’ennuie. Mes collègues de travail me trouvent la mine sombre. Les ouvrières sont rêches, mal habillées, assez peu féminines à mon goût. De plus, ce trouble me donne la nausée : elles ont des ongles sales. Elles possèdent la parole facile,me lançant des gros mots à la pause casse-croûte, maternant le gentil petit étudiant. Alors, je me replie sur la secrétaire de l’accueil à l’administratif. Elle me donne le tournis chaque soir et j’écris des histoires où elle tient le premier rôle dans des positions plus ou moins salaces que lui imposent mon imagination débordante.
A l’ouest s’écouleront deux mois sans importance alors qu’à l’est ma vie allait prendre un essor nouveau.
En recevant ma convocation pour le service militaire, je tire un peu la gueule.
Allez, asseyez-vous, je m’appelle Michel Fourniret, enchanté, moi c’est Pierre Chanal.
Mourmelon, la Marne, son 51 sans anis, le froid, la neige, le vent, et puis quand la neige fond, la boue.
Cet hiver promet d’être rude et triste sur une partie de la France.
A cette époque, les séries américaines n’avaient pas encore inventé le terme « profiler ». C’est dommageable, surtout pour les victimes de Chanal qui ont disparues et qu’il a torturées, profitant du silence complice de l’armée et du confort lugubre, rustique, de son camping-car.
Puisque j’ai fait quelques études, dit-on, on me nomme vaguemestre, poste à responsabilités, qui correspond plus ou moins à un facteur dans le civil. Une jeep de fonction et mon chauffeur pour m’emmener chaque jour à la poste de cette ville barbelée.
Au cinquième régiment de dragons où Chanal se trouve, je crois l’avoir croisé une ou deux fois. Un type relativement banal, aussi banal que votre serviteur. Des années plus tard, je le croiserai à la télé en prime time. Vous faisant grâce des détails sordides qui accompagnaient tous ses crimes. Il fut un homosexuel refoulé comme l’armée sait si bien s’y prendre pour en générer. Dans son travail d’investigation, la police n’a pour ainsi dire bénéficié que d’une aide à contre cœur des hauts gradés.
La peur de trop secouer le cocotier et de voir se prendre sur la tête des trucs très lourds , des trucs qu’on sait déjà qu’on aura du mal à assumer.
La gente galonnée est d’une rigueur absolue , d’une droiture sans failles. Aussi, les homosexuels refoulés, on les a tous renvoyés chez eux avec perte et fracas. Ici, ce n’est que la bonne virilité bien assumée et de bon aloi, tous ces jeunes garçons qu’on forme, droits dans leurs rangers bien cirées à marcher au pas, faire leurs lits au carré, éventuellement défendre la France. Ce seront des hommes, des vrais qui traverseront les paysages où nul arbre ne repoussera après l’infernal bruit d’acier qu’engendre la chenille du char quand il se met en action et dévale les plaines de la Marne.
Pour ainsi dire, a cette époque- là, Mourmelon c’est une immense ville de garnison. Tellement peu de civils qu’en atteignant la ville tu as l’impression bizarre de sortir d’un enfermement pour entrer dans un autre. La grande rue principale, et ses dix ou quinze bars d’un côté, ses dix ou quinze bars de l’autre. L’effet miroir est stupéfiant. Au bout de cette rue, un cinéma porno où de joyeux driller viennent s’exciter sur des films bien franchouillards, aux titres ronflants, provocateurs, dans la plus grande tradition. Là-dedans, dans ce fourmillement de tenues militaires plus ou moins débraillées, ça gueule, ça se pousse du coude, et ça rigole. On se congratule, c’est d’une franche camaraderie. Certains, qui ont trop bu vraiment, parviennent non sans mal à se frayer un chemin jusqu’aux toilettes pour vomir, les autres, les plus maladroits, disons les moins rapides, gerbent à même la moquette tandis qu’en cinémascope hurlent des « Ah oui encore, vas-y…! ». C’est vraiment d’une franche camaraderie que ça en devient touchant. Il me souvient que le jour de la libération de notre contingent, les effluves de la veille avaient poussé un jeune appelé à grimper sur le toit locomotive. A cause de cet huluberlu, le train a pris quelque tard. Ils ont enfermé ses restes dans une petite boîte. D’après les témoins proches, une odeur de sardine grillée avait rendu l’air irrespirable.
…L’armée vous forme, vous instruit, elle vous apprend un tas de choses. L’alcool devient votre ami, précieux aide de camp, celui qui restera à vos côtés chaque jour que dieu fasse. L’alcool, gangrène sociale, qui vous obligera plus tard à battre votre femme afin qu’elle ferme sa grande gueule, vous laissant peinard à regarder le fameux match de foot à la télé.
Dans ce microcosme impuissant à créer des relations humaines dignes de ce nom, l’apprentissage de l’humiliation, de la solitude glacée d’une ville de garnison. Une solitude au milieu de cette faune, de ce tas d’immondes dégénérés, tel appelons-le, le lieutenant X.
Un bel homme, grand, bâti comme un chef de guerre, carnassier et fanatique, ses hobbies se résumant pour l’essentiel aux vieux chants très glamours, marqués IIIeme Reich.
L’ homo erectus , dans toute sa grandeur, que l’histoire a refoulé.
Et voilà soudain que le complexe du petit gros resurgit. Ce jour-là, séance de tir en rafales, au Famas s’il vous plaît. Depuis un bon moment le lieutenant X a choisi sa tête de turc, le bouc émissaire. Il en faut toujours un. La jeune recrue s’appelle Eric, il a dix neuf ans, joufflu, l’œil torve, d’ailleurs tout le monde s’amuse à le moquer sur son physique. La mobilité réduite de ses capacités intellectuelles permet au groupe de se défouler de ses peurs et de son ennui. Sans ménagement et sans les contraintes des lois civiles.
En plus d’être un petit gros, fonction sociale déjà difficile à assumer, il n’a pas trouvé de meilleur moyen que de mouiller ses draps le premier jour de l’incorporation. Alors depuis, il porte un surnom qui est agréable à entendre : « La pisse ». Devenu la risée de tout le monde, pour lui vous n’avez qu’à multiplier le parcours du combattant par dix et vous obtiendrez le résultat de l’opération facilement.
Sous les ordres du lieutenant, l’officier du pas de tir, nous nous présentons par rangées de cinq ou de six sous l’immense hangar et nous commençons le tir en rafales. En zig-zag les balles fusent, les chargeurs se vident. Des balles réelles comme à la guerre, un bruit métallique et assourdissant. Plus loin, à ma droite, une arme s’enraye. C’est le Famas du petit gros, évidemment. Tandis que nous continuons de tirer, lui se retourne, son arme toujours chargée en direction du lieutenant. Mesurant rapidement la situation, il se précipite sur lui, le désarme et le gifle magistralement.
Les mots fusent, sortent de sa bouche comme des balles en rafales :
– Espèce d’idiot, de con ! Crétin ! Débile !
La séance s’interrompt. Le lieutenant nous fait tous sortir du hangar et nous rassemble dans la forêt proche, sous un grand arbre. Il nous fait mettre en cercle. Il ordonne au petit gros de se déshabiller entièrement.
– Trente pompes pour commencer et à chaque fois que tu te relèves tu dis « J’enc..le ma mère ! J’enc..le ma mère ! »…
Alors que certains pouffent en silence, dans ma tête tout commence à sonner trop faux, trop fort. Ma gorge se serre, mon ventre me fait mal.
Aux prix d’efforts quasi surhumains le petit gros s’agite à effectuer les mouvements, le corps secoué de spasmes. De la morve coule de son nez jusqu’à ses lèvres.
Le ciel est gris. On dirait que l’orage monte.
Les atomes vont bientôt se rencontrer et la déferlante va se produire.
Le lieutenant tourne autour du corps nu en détresse comme s’il inspectait un morceau de viande, ce morceau de graisse qu’il étudie avec ses yeux froids et lubriques.
Je serre les dents si fort que mes lèvres saignent. Tout mon corps saigne.
« J’enc..le ma mère ! J’enc..le ma mère ! », à crescendo, ce mauvais rêve ne cessera donc jamais… !?
Le souffle coupé, le petit gros rassemble ses dernières forces puis s’affale sur le sol brûlant.
Le lieutenant tombe sa veste et se retrouve torse nu. Il est bâti en triangle, ses muscles sont luisants, ses biceps énormes.
– Allez ! On recommence, espèce de goret !
Il bombe le torse, s’adosse à l’arbre nonchalamment. A ses pieds, le visage gonflé du petit gros. Le lieutenant s’allume une cigarette et lui crache la fumée au visage.
Je sens la haine monter en moi et plutôt que de la compassion, je voudrais agir, un couteau entre les dents, lui couper les couilles et lui faire bouffer, mais je n’interviens pas. De là-haut, quelqu un m’observe et j’imagine qu’il n’est pas très fier de moi.
En plus d’être un raté, ce qui à fortiori n’est pas si grave que ça, je suis à présent devenu un lâche, un peureux, une couille molle...
Quelques jours plus tard, le sergent a retrouvé le petit gros pendu sous le même arbre qui avait servi de scénario à ce moment sordide. Jusqu’à la fin de mon armée, me rasant devant la glace, je n’ai jamais pensé à devenir président de la république, mais j’essayais d’éviter mon regard, la lame de rasoir passant de nombreuses fois si près de ma gorge sans m’atteindre…
Re: La grande muette
une miette ? comme celles de Gérard Hocquet ?
une miette sèche, énorme, qui reste en travers de la gorge ...
Yzaé, en miettes
une miette sèche, énorme, qui reste en travers de la gorge ...
Yzaé, en miettes
Yzaé- MacadAccro
- Messages : 696
Date d'inscription : 07/10/2009
Age : 65
Localisation : touraine
Re: La grande muette
Le seul courage que j'ai eu face au service militaire fut de ne pas m'y soumettre.
Non par insoumission, non par conviction pacifiste. Non par dégoût.
Plutôt par mauvais goût.
Ce mauvais goût que donnent les choses apprises par 45° à l'ombre à la vue des mouches qui viennent sucer les moignons des lépreux dégagés à coups de crosse pour faire plus propre sur le chemin d'un cortège officiel dans quelque république bananière.
Ce mauvais goût que laisse le passage d'une armée de conscrits en goguette dans la rue principale d'une ville de garnison.
Ce mauvais goût des odeurs de dégueulis dans les toilettes de ces dix ou quinze bar de chaque côté de la rue.
Ce mauvais goût que j'ai toujours de ne pas aimer les contraintes.
Et puis j'avais déjà trop lu, je m'y serais ennuyé.
Alors j'ai eu le courage de faire une dure et longue grève de la faim préventive avant mes "trois jours".
L'armée n'a pas voulu de moi... Trop maigre... Elle n'a pas souhaité prendre de risques.
Mais n'allez pas me croire antimilitariste, c'est simplement que je n'aime pas les dortoirs, le froid et les marches forcées.
Le texte ?
Je viens d'en parler. Rock and LoL, comme d'habitude.
Nilo, à droite, droite !
Non par insoumission, non par conviction pacifiste. Non par dégoût.
Plutôt par mauvais goût.
Ce mauvais goût que donnent les choses apprises par 45° à l'ombre à la vue des mouches qui viennent sucer les moignons des lépreux dégagés à coups de crosse pour faire plus propre sur le chemin d'un cortège officiel dans quelque république bananière.
Ce mauvais goût que laisse le passage d'une armée de conscrits en goguette dans la rue principale d'une ville de garnison.
Ce mauvais goût des odeurs de dégueulis dans les toilettes de ces dix ou quinze bar de chaque côté de la rue.
Ce mauvais goût que j'ai toujours de ne pas aimer les contraintes.
Et puis j'avais déjà trop lu, je m'y serais ennuyé.
Alors j'ai eu le courage de faire une dure et longue grève de la faim préventive avant mes "trois jours".
L'armée n'a pas voulu de moi... Trop maigre... Elle n'a pas souhaité prendre de risques.
Mais n'allez pas me croire antimilitariste, c'est simplement que je n'aime pas les dortoirs, le froid et les marches forcées.
Le texte ?
Je viens d'en parler. Rock and LoL, comme d'habitude.
Nilo, à droite, droite !
_________________
... Tu lui diras que je m'en fiche. Que je m'en fiche. - Léo Ferré, "La vie d'artiste"
Re: La grande muette
Un coup dans le Mur à Dédé et voilà ce qui arrive !
Nilo, comme une carpe.
Nilo, comme une carpe.
_________________
... Tu lui diras que je m'en fiche. Que je m'en fiche. - Léo Ferré, "La vie d'artiste"
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