Ces mots qu'on ne dit pas

Et puis il y a ces mots que l'on ne se dit pas
que l'on ne s'est jamais dit,
on se dit quand même que c'est pas grave
qu'il y a un avenir là-bas
où peut-être on ne pourrit pas
avant d'avoir eu le droit
de dire qu'aimer c'est pas si facile à faire

Alors on prononce ces mots que l'on n'oublie pas
qu'on ne s'est jamais permis d'oublier
un soleil fier comme la mer
dérobe alors au soir des voluptés enfin
on rit des larmes de filles de joie
on pleure des lames gantées dans de la soie

Quand on y pense on se dit que tout ce temps
passé à se taire de peur de quoi
de peur de tout et de rien aussi
c'est bon de dire, alors on les répète ces mots
on les hurle contre les parois du vent
on en prend sur soi, comme des mains aimantes
on s'en caresse, on s'en repaît de peur de les perdre encore
et qu'on ne se souvienne plus
qu'on s'est tant tu

Et puis on n'y pense plus, on rêve d'avant les mots
on se remémore ces instants passés à se taire
et à faire comme si, à faire comme tout le monde
peut-être ne devrait-on pas, regarder derrière nous
ces chemins traversés par les silences d'en bas
peut-être devrions-nous apprendre que ce qui fut
restera ainsi gravé dans une mémoire
aussi pleine que la mer, sur les rivages coincés
de nos révoltes d'enfant, d'enfant malgré nous
à chialer contre le sein des mères qu'on n'oublie plus

Alors on dit aux étendues de verre,
dans les miroirs gelés contenus là
où les langues mêlées
n'en peuvent plus de dire et de répéter
que l'on se couchera heureux d'avoir tant rêvé

Très beau texte LC.

Nilo, c'est tout.