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Anecdote ou performance ?
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Macadam :: MacadaTextes :: Nouvelles
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Anecdote ou performance ?
(image)
Sur le quai à Malesherbes, un type rasé marqué au rasoir en bomber, fûts et Dock noirs, attendait immobile sous une pub “ÉPILEPSIE” Quand je le regarde à nouveau, quelque chose avait changé ; le simple fait qu’il fumait était marquant, car elle était blanche. Elle seule. On ne voyait qu’elle.
(mirage)
Le ciel lourd, la pluie incessante, l’horizon bouché - y part quand ce putain de train ! - pressé de partir mais... car je savais que je n’étais pas encore arrivé : je devrais me taper le trajet à pince de Maisse à Milly, par forêt et champs, sans déchanter. Déjanté. Je dois être déjanté pour faire cela, mais ai-je vraiment le choix ? J’ai la haine et je ne sais pas... mais quelque chose me dit que j’aurai bientôt la rage en faisant du stop - tous ces blaireaux pressés de partir en week end et dégoûtés du temps pisseux, ça aura bientôt foutu la dispute dans leur couple un tantinet tristounet.
Le silo à grains, Maisse : je suis presque... parti. Rendez-vous dans le bain - même le bain sera salé, ma pénitence dans la fumée, d’avoir trop fumé...
(souvenirs)
Devant la gare de Maisse où je descendais, il y avait une vieille maison 1900 à pignons reconvertie en maison de retraite.
Elle ressemblait beaucoup à celle de Norman Bates dans Psychose.
Mon père y était connu et toujours bien accueilli comme médecin. Un jour, comme il était très tôt, j’étais allé l’attendre avec ma jeune soeur et on nous avait servi un café dans la cuisine, avec croissants s’il vous plaît. Tout ça par ce qu’on avait eu la bonne idée de s’y aventurer en annonçant le nom du père. Prononcé sans articuler, non pas qu’on fût gêné, mais fatigués et droguis de cette heure interminable de transport ferroviaire ; mais c’est comme si on nous attendait ici depuis longtemps. Remontée après le café, ma soeur appela à la maison dans le bureau d’une responsable de service, et nous pûmes donc l’attendre au chaud et au sec.
Ce matin-là d’hiver, il tombait une pluie fine et glacée.
(idée)
J’avais sonné à la porte, non pas pour téléphoner à la maison et attendre au sec qu’on passe me prendre (les parents étaient partis en week end à Deauville), mais pour savoir si, à tout hasard, quelqu’un ne partait pas pour Milly dans l’heure qui suivait ; le problème, c’est qu’il était tôt, seize heures, et il fallait attendre dix huit heures trente - d’ici-là, me dis-je, je serai bien arrivé.
En piste.
Une fois lancé..., je dois dire que mes jambes avançaient plus vite que ma tête ; j’écrivais mentalement une histoire à dormir vautré pour inversé la tendance : que ma tête avance au même pas que le reste. Mais c’est beaucoup rêver... il commence à pleuvoir. Pour me décourager, une pancarte << Supermarché Champion, à 3 min sur la gauche >>, sera à trente minutes pour moi, droit devant. Suivant les tirets blancs, frôlant le filin rouge blanc d’une barrière improvisée de chantier E.D.F., je faillis déchirer ma manche sur une tige filetée ! J’avançais comme un aveugle avec mon stylo blanc des labos en guise de canne et mon billet de train gris comme lunettes noires éclairantes. Pause goudron, à l’orée du bois, sur une pierre tombale plate sous une bête jaune désarticulée.
En repartant, je suis plus grand de dix centimètres, non pas d’être reposé et regonflé, mais parce que j’ai une nouvelle semelle de boue blanche et collante ! Je vacille sur l’asphalte, comme une galère royale empannée par tribord. Je manque de m’empaler sur une tige filetée, j’amorce la descente et rentre dans la forêt. Un vélo qui monte péniblement : c’est dur hein ? Malgré son V.T.T. de malheur, il devait souffrir comme l’esclave enchaîné au flanc de la galère et peser un âne mort sur ses pédales en coton ; ne tarde pas d’ailleurs à s’arrêter, après m’avoir dépassé et mettre pied à terre. Je laisse passer une averse sous un petit chêne, et repars de plus belle. J’écrase un escargot de la route (plus gros) et manque de glisser dans la zone interdite ; il faut le vivre pour le croire, pas le voir pour le croire, car ça ne suffit pas. Mes arrêts écriture sont de plus en plus fréquents, comme une hémorragie douteuse, inquiétante et sale (car illisible) ; me prend une envie folle de pisser. La dernière fois que j’ai fait ce parcours, c’était par une chaleur étouffante, cette fois il pleut des cordes : c’est toujours dans des conditions extrêmes, pourquoi ? (une voix: ) “C’est extrême à la mesure de la tâche... le ciel est avec toi !” - Mais c’est une performance alors !
En fin de descente, au sortir du bois, je trouve un pylône en béton avec des renfoncements comme des pupitres miniatures ; j’y pose un coude, puis mon papier pour écrire encore une idée pressante... Mais qui n’a jamais connu ce genre d’urgence, quart d’heure de folie où on oublie tout de ses résolutions pour faire un nouveau constat qui ne devra pas être négatif, ni nul : voire un nouveau départ. L’urgence de ne pas en rester là - ce qui collait tout à fait avec mon envie d’avancer pour arriver bientôt et repartir aussitôt libre, en rêvant ou... (imaginez)
Maintenant, je m’exprime sur du P cul trouvé dans un fossé, bientôt sur des Pub-prospectus de “Carrefour à 100 m à gauche” - la déchéance va bon train.
Marche les jambes écartées comme une femme enceinte, grotesque, ce qui fait marrer les voitures qui viennent en face... mais alors pourquoi celles qui me doublent à droite Klaxonnent-elles en souriant ?
Ma bible, ce billet de train qui apaise ma conscience, soulage mes sens... que je me suicide si je le perds : si facile. Un écart à gauche, si facile. On fait de la politique maintenant !
Ca rend vraiment con de marcher tout droit vers une destination malheureusement pas inconnue. Ce billet plein de mots et la feuille des horaires plus illisible que jamais qui, si je la perds, me fera pleurer ; heureusement que mon encre est bleue, dieu merci. Il se met à pleuvoir grave, un déluge. Grave. - Bien fait ! Tu n’avais qu’à pas implorer Dieu.”
J’ai voulu couper à travers champs, mais le sol détrempé me l’a défendu : j’aurais pu m’enfoncer encore plus.
Je compte mes pas : “1, 2, 3, 4 (noir), 1, 2, 3 (blanc) - Raciste ! Je vois le clocher, je suis arrivé.
Milly, ville des calèches et des pavés, peux marcher au milieu de la rue sans rien craindre, car tout le monde ici me connaît, même de dos, même les chevaux !
Au rond-point
Je trouve une pierre pour m’asseoir et écrire encore une phrase, histoire de profiter du gain de trois petits mètres en coupant tout droit au rond-point. Je méritais bien une pause. Je regarde une pancarte avec des dessins des Halles et la Chapelle des Simples associée bêtement à Cocteau, l’autre Dieu de ce bourg ; “Le marché de l’herboriste” est collé sur son nom - j’en fumerais bien une autre ! me dis-je en pensant aux fils héritiers deuxième génération. En repartant, une voiture prenait le rond pour entrer dans la ville ; j’atteignis la sortie avant elle ; j’allai plus vite qu’elle ; banal, mais c’était la première fois !
J’ai pas fait dix mètres que je suis à la recherche d’un papier, pas pour m’essuyer, mais pour écrire la fin... quand je tombe nez à nez avec une affiche de “Milly en Fleurs” (affiche pour un concours que j’ai réalisée avec l’appui de la mairie, très bien réussie)... Assis sur une borne en pierre, je compte les crottes de cheval qui se mêlent au sable pour remplir les joints entre les pavés - ciment de l’ancien temps. J’aime bien l’encre de mon stylo sur ce papier buvard (car la Mairie avait choisi un papier arches brun et non le traditionnel papier blanc glacé) ; pas grave si je ne me relis pas, j’ai plus important à faire : récupérer les clefs chez les voisins avant qu’ils passent à table.
Assis sous un platane devant une clôture d’iris de Van Gogh, je contemple la masure de l’ami cambrioleur que je connais bien, quel con ! (Moi, bien sûr !)
Je sonne chez le voisin déménageur ; sa femme m’ouvre après cinq minutes qui paraissent une heure ; - “tu veux les clefs ? - Oui merci... - Entre (mon nom) - Non, dis-je, j’ai les semelles crottées !”
Je crains de rester à la porte car la grosse clef noir butte au portillon. Je tourne la poignée en branlant la clef et ça s’ouvre, un signe, enfin ! Je me dis que c’était encore mieux qu’une performance, alors ! Je n’ai qu’une idée : manger. D’autres auraient pris une douche pour entamer la soirée proprement, mais j’avais assez vu de flotte pour cette fois. La suite ne vous regarde pas. L’est peut-être là, l’exploit ?
Dam.
Re: Anecdote ou performance ?
Belle histoire, palpitante. On ne s'ennuie pas.
Mais
Bien fait ! Tu n’avais qu’à pas implorer Dieu
j'espère que tu as bien conscience qu'il n'y est pour rien s'il pleut, que les voitures qui passent t'éclaboussent et que l'encre bleue ne dégouline pas sur les prospectus du "carrefour à 300 m".
Nilo, anecdotique performer.
Mais
Bien fait ! Tu n’avais qu’à pas implorer Dieu
j'espère que tu as bien conscience qu'il n'y est pour rien s'il pleut, que les voitures qui passent t'éclaboussent et que l'encre bleue ne dégouline pas sur les prospectus du "carrefour à 300 m".
Nilo, anecdotique performer.
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... Tu lui diras que je m'en fiche. Que je m'en fiche. - Léo Ferré, "La vie d'artiste"
Re: Anecdote ou performance ?
Merci Nilo. Dans l'état où j'étais, je crois que j'aurais suspecté n'importe quoi de se mettre en travers. Et pesté pareillement.
Après coup, au chaud et au sec, c'est une autre histoire.
Dam.
Après coup, au chaud et au sec, c'est une autre histoire.
Dam.
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