Les vipères mutantes, un hibou et Philippe Djian

Piégé au sol, j'écoutais le dernier souffle
des vipères mutantes
Un hibou se faufila entre les nuages
je voyais bien que lui aussi écoutait
le dernier souffle des vipères mutantes
à moins qu'il ne m'observe
comme un train arrêté au milieu de la voie

J'avais emmené dans la poche de ma veste
un exemplaire déglingué d'un livre de Philippe Djian
je m'étais dit que ça me permettrait
de regarder différemment le coucher du soleil
et la naissance des étoiles
mais la lune était noire et les étoiles ne naîtraient pas
ce soir, j'étais bon pour attendre l'aube

Je crois bien que le hibou avait atterri sur une branche
juste au-dessus de moi, les vipères s'étaient éteintes
nous étions les deux seuls êtres vivants de la forêt
je me demandais si quelque part Philippe Djian
avait écrit des pages sur les hiboux
et les vipères

Comme j'étais seul et incapable de communiquer avec un hibou
je me mis à parler seul, et fort
de sorte que mes paroles rebondissaient contre le tronc
des arbres aussi noirs que l'intérieur d'un poing
était-je fait du même bois que les arbres
si je me concentrais serais-je capable de déployer
des ailes comme les hiboux ?

Ses yeux s'ouvraient et se fermaient frénétiquement
ils étaient d'un jaune translucide, comme des clignotants
d'une voiture garée au sommet d'un arbre
d'une voix frémissante, je m'adressai à lui
« ne me regarde pas comme ça, je vais pas finir
comme les vipères mutantes, je serai encore là
demain matin »
je ne sus s'il m'avait compris mais j'entendis ses ailes
se déplier et son corps se dilua dans le ciel noir

Etrange, cette petite histoire ^^ Mais bien écrite, comme d'hab

Sasvata, comme quoi le camping...

Il est superbe LCbeat !
Un aventurier, peut-être tombé du ciel, explore une terre inconnue...Au fil du poème, tu as su traqué avec justesse la solitude existentielle et la peur qui l'accompagne et cela jusqu'à la fin. Les vipères mutantes presque mortes ne laissent présager aucun signe favorable quant à l'issue du héros.
Que s'est-il passé sur ce territoire ? Pourquoi ces reptiles ont-ils muté ?
Une atmosphère fantastique imprègne chaque vers.
La figure du hibou liée au surnaturel, à la magie, à la mort mais aussi à l'intelligence réflexive nous entraîne sur les rivages inquiétants de la poésie...

Piégé au sol, j'écoutais le dernier souffle
des vipères mutantes
Un hibou se faufila entre les nuages
je voyais bien que lui aussi écoutait
le dernier souffle des vipères mutantes
à moins qu'il ne m'observe
comme un train arrêté au milieu de la voie

Je rejoins Sasvata sur le "bien écrite comme d'habitude".
Mais je n'ai pas senti le souffle habituel. Dommage.

Nilo, anti-poison.