Malcolm Lowry - Au-dessous du volcan

Ce topic pour vous faire partager ma dernière lecture (sur les conseils avisés de Swann, je le précise, pour ne pas m'attirer ses foudres). C'est un immense roman, grandiose, poétique, onirique, pathétique. On dirait, en un peu plus de 600 pages, que des mondes discutent entre eux. Les personnages sont vastes comme des villes, les paysages du Mexique décrits avec amour et frayeur - les volcans, les cantinas, les ruelles, les Palais en ruine.

C'est un peu l'histoire d'un amour terminé, et de deux êtres qui essayent - sans y croire, mais ils font ce qu'ils peuvent - d'en ranimer les cendres. Le Consul, ivrogne au dernier degré, qui sombre peu à peu dans le delirium tremens, Yvonne, qu'il a toujours aimée mais qu'il a perdue plusieurs années, Hugh, le frère du Consul à la dégaine de cow-boy, ancien chanteur parti en mer à 17 ans pour fasciner les médias et qui se nourrira de désillusions.. et d'autres.

Un passage - il est absolument impossible de le considérer comme le meilleur puisqu'il y a des merveilles tout le long du bouquin - pour vous mettre l'eau à la bouche.

'Le Scorpion, qui se couchait... Le Sagittaire, le Capricorne ; ah, là, elles étaient après tout à leur place, ici leurs configurations tout d'un coup correctes, leur scintillement de pure géométrie, impeccable. Et cette nuit comme il y avait cinq mille ans, elles se lèveraient, se coucheraient : le Capricorne, le Verseau avec, au-dessous, Fomalhant solitaire ; les Poissons ; et le Bélier ; le Taureau, avec Aldébaran et les Pléiades [...]
Cette nuit comme il y a tant de Siècles, voilà ce que les gens diraient, s'ils ne leur fermaient la porte, en détournant d'elles leur indigente angoisse ou tournant vers elles leur amour en disant : 'Voici notre étoile là-haut, la tienne et la mienne' ; ils s'orienteraient sur elles, au-dessus des nuages ou perdus sur la mer, ou debout dans l'embrun au poste d'équipage les regardant, tout à coup, plier sous le vent [...] ils braqueraient sur elles, en un millier d'observatoires, de faibles télescopes aux lentilles desquels flotteraient un mystérieux grouillement d'étoiles et des nuées de sombres étoiles mortes, les cataclysmes d'explosions de soleils, ou l'Antarès géant qui fait rage vers sa mort, cendre en feu, mais cinq cents fois plus vaste que le soleil de Terre. [...]

Loin et bas au sud-est l'oblique croissant de lune, leur pâle compagne du matin, se couchait enfin, et elle la contempla - l'enfant morte de la terre ! - en une supplication étrange et avide.
- La mer de Fécondité en forme de losange et, pentagonale, la Mer de Nectar, et Frascatorius au mur du nord écoulé, le géant mur d'Ouest d'Endymion, elliptique auprès du limbe d'Occident ; les monts de Leibniz à la Corne du Sud et, à l'est de Proclus, le Marais d'un Songe. Là se trouvaient Hercule et Atlas, en plein cataclysme, au-delà de notre savoir -
La lune était partie. Une chaude bourrasque leur souffla à la face, au nord-est flamboya un blanc zigzag de foudre : le tonnerre parla, laconique ; avalanche en suspens.'

Un roman long en bouche comme le meilleur mezcal... Mais pas pour tous les palais. Il se mérite.

Swann,

Je pense que je ne lirai jamais ce roman (parce que je n'en lis que très peu depuis longtemps et ensuite parce que m'attaquer à un monolithe de 600 pages m'effraie par avance) mais je tiens à venir laisser une trace de mon passage ici pour encourager ceux qui font l'effort de venir nous faire partager leurs lectures et pourquoi pas nous donner envie de les suivre.

Nilo, dans quel état j'erre.

Gérard, tu devrais, pourtant.

Swann,