Songe un requiem avec un chœur d’enfants

Ce fut au sombre détour d’une allée que disparut l’enfant. Il avait dans sa poche une agate polie qu’il serrait bien au creux de sa menotte. Et, platine, la lune reflétait le profil de sa mine grise et pâlotte.
Il se haussa d’un cil à la cloche sonnée de l’église, toute proche.
D'une étrange façon, le parc, noyé dans l’ombre de ses frondaisons, faisait voir au garçon, par le truchement d’un rayon de lumière, mille chimères à l’abandon.

De noires éphémères. . .

Des demoiselles ayant l’air de brindilles de tulle. . .

Des brins de filles irréelles aux robes soulevées et dont les regards se dérobent. . .

Des lézards devisant sur l’art de la lecture, divisant les passions,
et des bulles de verre, préambules de hasards bien pire qu’une simple histoire de vampire. . .

Des sorcières mésusant de simples compliqués. . .

Mille voyages échoués, désirs écroués dans le désespoir d’un cou, dont le col relevé ne laisse aucun espace pour s'immiscer vers le charme entrevu.






Ce fut à la nuit tombée qu’une alarme oubliée, saisie d’insomnie, s’en vint troubler la quiétude du quartier.

Des pas précipités sur le gravier.

Un bruissement dans la roseraie.

Un arrêt sur image, prélude d’un orage, où l’éclair aveuglant couvre d’un voile blanc, fascinant, une faille qui s’ouvre sur des rets et des mailles.

Et l’enfant, aussitôt, s’évanouit.






Ce fut une cour intérieure qui vit le gamin, gisant dans un écrin illuminé d’azur, parmi la pourriture, à l’heure des poubelles, allégé de sa bille. L’âme sciée au centre de son ventre par une lame d’acier trempé, la chemise en guenille, l’esprit éteint, et du sang plein la bouche. Et la couche d’ordure au dessus de sa peau, vêture sans velours où les sens se situent, hors les rues, dans bien des caniveaux.






C’est avant le matin engourdit par le froid, qu’on retrouve l’enfant, sans vie.
Entre deux containers avares de leurs rêves.

Ici que tout s’achève.

La lumière des phares, celle du réverbère, font un roi couronné de perles de rosée, égaré sur la grève d’une rigole, où se reflète la liqueur de ses yeux amoureux, dont les miettes d’ardeur s’affolent vers des ailleurs où la volonté du seigneur, Dieu soit loué, n’a pas droit de cité.






Il y eut un enterrement, des montagnes de fleurs, une enquête, la silhouette d’un prévenu, une garde-à-vue peu convaincue, des grenouilles fardées, des nouilles en pleurs. Une quête. Des sons de cloches hasardés.
Un cœur de mère que ronge le malheur. Un père qui longe la chaussée.

Et la colère vengeresse.
La rage.
La sidération d’un village.






Il fallut bien longtemps avant que la campagne, à nouveau, fasse liesse et l’amour.
Que la jeunesse fasse son droit, hypokhâgne, ait son lot de brebis, de veaux, ou son verger de fruits.

Il fallut bien du temps, et bien des guerres lasses, avant que l’on se fiche du tout et de l’avenant.
Du présent.
De la vie.
De la biche et du loup.

Et bien des manquements à l’usage, bien d’oiseaux pour les cages, bien des maux, afin que le mensonge soit, lourd, de retour à la messe.






Songe un requiem avec un chœur d’enfants.

Amen.

Des images fulgurantes, pour un texte tout en images. cette peinture incisive, efficace, sans mot de trop, me plaît beaucoup.

Très beau texte !
Comment se fait-il que je ne me sois jamais arrêté ici ?
Ni moi ni personne d'autre qu'un Vivant de passage.
Heureusement que le Mur à Dédé ne sauve pas que les apparences.

Nilo, corps à choeur.

fait d'hiver qui fait froid, difficile de dire que j'ai aimé, mais touché, ça oui