Humanoïde exacerbé croise le fantôme d'Elvis Ferré

Nuit Codée, Sidney Lumet est mort aujourd'hui
les mailles nouées font des ronds de fumée dans l'hyper-sphère
comme dans cet essai de Roland Barthes où l'on apprend
que la langue est une solitude et le style une prison

Je vole au cul du style, déformé par l'absurdité de l'angoisse
cherchant là les solutions invisibles,
dissoutes dans la séduction d'avoir peur
Je suis libre dans la prison du versificateur, falsifié
tenant entre mes mains les testaments de l'océan
et des univers parallèles
J'accroche à mes doigts les bagues qui parlent
elles s'enroulent comme des serpents à fables
Le silence prend la pose, gesticule comme un ver nu
sur ma paume déchirée par Avril, par Sanglots

Le blues continue de mourir, Calvin Russel est mort en avril
peu à peu, à grands sangs et à petites eaux, le monde se dépeuple
en sa croissance, vertige, Alain Bashung n'a probablement
jamais mis les pieds dans le Vercors
pas plus que je ne mets les pieds dans les empreintes des femmes
j'observe, les étoiles, les planètes esseulées
je ne fais que regarder les femmes marcher pieds nus
dans la neige, quand le crépuscule cesse ses déflagrations

Le Réseau comme une poudrière, un feu de baïonnettes
l'écran se voile et déplie les ailes langoureuses des anges décapités
Je suis la vertèbre cervicale de mon propre corps, situation ostentatoire
de la nostalgie et de la mélancolie, l'usurpation du verbe purificateur
mais le verbe se tait quand la forêt prend feu
mais le mot, à la rescousse des délibérations sismiques,
prend acte, relai entre l'effroi et le col brun des hiboux

La poésie est une balle dans la tête

Nuit déchiffrée, Elvis Presley est mort, Chet Baker pisse
ses souvenirs dans les caniveaux hollandais, La poésie est le cercueil
des misérables, fut-elle bourgeoise, fut-elle aristocratique, anarchique
fut-elle le monde aux épaules nues et à l'épine caudale
Léo tes papiers ! Je fais une prière, que Bohringer ne crève pas
cette année, ni l'avril suivant

J'y reviendrai, mais je dis déjà une chose : Oh Putain !

Nilo, Rock around The Nana.

"La poésie est une balle dans la tête"

j'adhère à ta roulette russe

Et j'y reviens, pas plus tard que le jour même. Je ne pouvais pas différer cette nouvelle visite.
Pour bien m'imprégner de cette répulsion d'avril,
et de mars qui a vu partir Bashung et de Staël,
et de juillet qui a vu partir Ferré et Céline,
et d'août qui a vu partir Elvis Presley et Philippe Léotard,
et de septembre qui a vu partir Breton,
et d'octobre qui a vu partir Brel et Kerouac,
et de mai qui a vu partir Evariste Galois,
et puis merde, je ne vais pas faire un éphémérides des disparus que j'aime.

Mais merde quand même.

Très beau texte LC, d'une écriture ciselée à l'emporte-pièce, c'est dire si ça déchire.
La poésie est une balle dans la tête

Nilo, Art que buse.

Un texte puissant, tatoué dans les consonnes.
J'imagine des zincs cramés, des coudes de baroudeurs épuisés mais encore à main nue, levée de verre doré, tremblement des cordes à vocalises et basses.
Et puis, autour d'eux, leurs ombres chères qui grattent encore un peu de musique au temps.

J'avais eu l'occasion d'apprécier ta plume ailleurs. Trop rarement, d'ailleurs.
Je ne suis pas déçue (ça va pour la suggérance ?) de la retrouver ici.
Il y aurait trop à citer, autant garder le tout.

Je m'incline devant ce texte.

Je profite qu'il ne soit pas loin dans la liste pour vous remercier de vos lectures.