Journal de Zette, « au pays des merveilles »,

Cher Lapin,

Je viens d’avoir neuf balais. Je sais que c’est vieux. Je ne vois pas du tout ce que je vais faire de ces crins.
Crocs oui, mais crins et manche en plastoc qui colle aux doigts ?
Les mettre dans un écrin pour quand je serai jeune vraiment ?
Genre vers là-bas de l’autre côté du pont.
Quand j’aurai quitté l’école maudite des notes pourries sur carnet noir ?
Demain j’interroge la Vierge toute puissante qui dort dans le trou du monde, je suis sûre qu’elle saura bien me dire quoi faire de ces années écoulées dont je ne me souviendrai plus tout à l’heure.
Quel cirque que ces anniversaires ! Le cousin Léon, la cousine à moitié folle d’amour, qu’on enferme régulièrement pour la calmer.
« Elle a des pulsions » dit l’oncle Mathieu.
C’est génétique ma parole, pourvu qu’elles m’oublient ces « pulsions »…
Donc , aujourd’hui ILS fêtent mes neuf ans. Maman entre deux bouches à bouches est allée acheter un gâteau bien sec.
Tante Grégorine beugle qu’elle n’a pas trouvé de poulet élevé au grain non modifié. Résultat on va paner du poisson sans queue ni tête.
Oncle Mathieu est venu les mains vides, à cause du chômage qui bouffe à tous les râteliers.
Papa, mort depuis deux ans, s’est excusé encore une fois de nous faire faux bond, le bruit court qu’il serait en Afrique à creuser un puits sans fond.
Tu sais journal, que les bruits courent plus vite que la rumeur, alors je fais celle qui est sourde.
Un peu comme le vieux qu’on aère en fin de semaine . Maman va le chercher à la crèche des séniles, le ramène quelques heures dans le jardin, lui fait une tambouille d’enfer à la paille et le rapporte bien emballé vers les cinq, six heures.
En été, parce que l’hiver comme l’heure tourne plus vite on le laisse près de son radiateur.
Tu vois quoi.
Le vieux est quasi muet.
Tant mieux.
Quelquefois je joue avec lui, je lui cache ses lunettes ou son déambulateur. Rires de le voir brasser l’air. Brasse coulée. Brasse papillon sans poudre sur les ailes.
Maman arpente la gamme chromatique des hurlements mais je dis que ce sont les taupes qui le mettent dans cet état.
Maman gobe tout.
Candeur ou imbécilité ?
« Indifférence » me souffle une petite voix dans mes côtes. Hausse les épaules Zette, le plus haut possible près du grand porte-manteau des étoiles.
Bon, pour l’instant c’est le grand déballage poivré, on chante « joyeux naniversaire, Zette ».
Je dois souffler des bougies magiques qui ne s’éteignent jamais. L’oncle en profite pour nous refiler sa blague à deux balles.
Au loin, j’entends ricaner les écureuils et retrouve deux trois glands dans les gobelets en carton.
Le pauvre tonton a failli passer l’arme par-dessus bord. On a bien ri de le voir tout rouge.
Pour une fois qu’on m’offrait un clown !
La cousine s’est mise à pleurer comme une limace en psalmodiant un « Ne nous quitte pas, tout peut s’arranger » à faire crever un crocodile. Je ne vois toujours pas le rapport avec les glands dans la gorge de l’oncle Mathieu…Là-dessus le grand-père s’est pris dans un vent de panique il s’est mis à mouliner l’ambiance façon éolienne dans la Baltique, Maman affolée ne savait plus à qui distribuer les priorités : à l’oncle qui s’étouffait ? Au vieux qui allait perdre un bras ? A la cousine qui entonnait son troisième Te deum ?
Pendant ce temps là, Tante Grégorine en a profité pour siffler le reste du mousseux, les miettes du gâteau desséché et piquer une sieste.
Tu parles d’un « naniversaire » !
Je viens d’avoir neuf ans sur ce rafiot, et Jeannot mon copain d’en dessous aussi. On ne fête jamais nos années dans cette vie ensemble. Cause des géniteurs qui se détestent.
Un autre jour je te parlerai de Jeannot le mort des poumons.
Un autre jour sans confetti.

Bon anniversaire Zette ! t'aurais mieux fait de venir fêter ça avec nous au macadapéro, DEDE t'aurait peut-être chanté une petite chanson, il a une belle voix (aprés deux ou trois verres cependant et c'est pas toujours trés distingué) et puis on a planqué une boite de nounours guimauve (faut pas lui dire surtout), bien sur, c'est un peu enfumé là dedans (je denoncerai pas celui qui fume le cigare, y se reconnaîtra) Surtout continue à nous donner des nouvelles...

Swann,

PS: Je te chanterai aussi "La maman du poisson... avec du citron..." c'est sympa...

Bon anniv Zettounette qu'on adore!
Bin non moi jte propose pas le Macadapero mais une virée entre filles dans la MacadFroufrou !

Ben merci à tous, pour une fois que l'oncle s'étouffe pas ! Bises de ma part et celle de Jeannot zaussi.
La lou franchement je croirais me reconnaître.
Euh, la " maman des poissons " est très cruelle au citron.

Je souhaite moi aussi un joyeux anniversaire à Zette et à sa... petite famille

Z, Zette's fan.

ps : qu'est-ce qu'il fout là ce Z sur le sac jaune ? Pourquoi je suis sur le baluchon de cette pauvre enfant seule dans la nuit ?

Hélas, Z Hélas... Tu n'es plus le seul Z de macadam... Zette te fait de l'ombre...

Swann, fossoyeur d'illusions

Salut la gonzesse, c'est Dédé.
On est d'la même génération on dirait. Même si en années d'ours ça fait un peu plus.

J't'inviterai au mien d'anniv', c'est à la fin novembre quand il fait bien froid, viens pas avec tes vieux sauf si tu veux les faire crever dans les courants d'air de Pigalle. C'est toi qui voit.
Dans l'après-midi on ira voir Nounours, mon grand-frère (j'en ai déjà parlé mais t'était pas encore là) qui fait salon de thé dans mon clandé jusqu'à 17h00. Après j't'emmènerai au Lux Bar, on chantera des paillardes avec les filles de joie.
Si on est encore debout on ira tuer la nuit au Chat Noir, ça porte bonheur.

J't'aime bien toi.

Dédé.

Ben dis donc !Pigalle ! Il a pas peur l'ourson ! C'est maman qui va en faire une tête !

Purée cette Ratoune! Mais quel talent tu as! J'adore ce style que tu maîtrises à merveille. Ratoune, à quand le livre? Hein?

EDIT; « Indifférence » me souffle une petite voix dans mes côtes. Hausse les épaules Zette, le plus haut possible près du grand porte-manteau des étoiles." Si ça , c'est pas de l'excellence d'idée, d'image, de poésie, je ne sais pas ce que c'est.( notamment)

Je cite, comme comateen, la clé de voute qui permet d'ouvrir les portes dérobées, déguenillées, désenchantées et délicieuses, de tous les champs du possible :
"« Indifférence » me souffle une petite voix dans mes côtes. Hausse les épaules Zette, le plus haut possible près du grand porte-manteau des étoiles."
On n'est pas sérieux quand on a neuf ans, et puis d'abord, pourquoi devrait-on le devenir ? Continue, Zette, encanaille-toi doucement mais surement... Anniversaire, mon cul !
Mes line, moi aussi, quoi.

bon anniversaire Zette, mais je suis très en retard !!!
je t'offre une grenadine et des nounours pour me faire pardonner ...
Yzaé

je le répète : drôlement bonne idée "un auteur à la une"
ps: elle est belle, ta Zette, Lalou !!!

Juste Yzae l'illustration de Lalou est de plus en plus adéquate. En tout cas je la garde.

Encore un bon coup de pied à la fois dans le Mur à Dédé et dans la fourmilière des textes oubliés.
J'espère que ce UP salutaire redonnera un peu de souffle à cette page du Journal de Zette et lui permettra de voleter quelques temps suffisamment haut pour être visible de tous.

Nilo, monts et merveilles.

Oh putain ! Dédé nous fait encore son coup du fan de Zette à l'occasion de sa dernière liste du Printemps de la Prose.
Et il a bien raison.

Nilo, marchand au souk des merveilles.

Ah ça oui, il a bien raison Dédé!!

Toujours un style impeccable, un point de vue pertinent, impertinent même, une innocence coupable... J'adore ^^

Sasvata, au moins tu t'ennuies pas pour tes zannivs...

J'ai fait le vœu de mettre mon aumône dans la sébile de tous les mendiants que je trouverai sous toutes les portes cochères qui mènent au Petit Etablissement de Crédit que je viens d'ouvrir au profit de ceux qu'en ont pas besoin. En particulier à la Seizième liste que j'vous ai filée.
Juste histoire de pas avoir bossé pour rien à les chercher pasque si j'compte que sur vous j'crains qu'y en ait qu'entendent pas le son de votre obole tombant dans leur coupelle.
Charité bien ordonnée...

Dédé.