La Boite à Morsures

Haïku Grunge Dim 2 Fév - 7:25

Joues de pêche, jupe à rayures, fringante comme une pouliche. Bafouée et qui ne désespère pas… Cette nymphette avait décidément du chien !

Il la suivait du regard, elle s’éloignait le long du canal tranquillement quand il décida de se jeter à sa poursuite. Pourtant, elle disparut au détour d’une rue. Paul l’avait déjà perdu de vue. Il était vêtue simplement mais portait avec ostentation un chapeau haut de forme.

Il aperçut une enseigne qui portait le nom de la boite à morsures. C’était une taverne mal éclairée et il fallait descendre un escalier étroit, qui sentait la pisse. Il n’était pas du genre à fréquenter ces établissements mais aujourd’hui il avait décidé de tout changer dans sa vie.

Alors, il commença à descendre quelques marches mais l’odeur immonde le rebuta. Il allait remonter quand un ivrogne l’interpella d’en bas :

« Elle me brûle cette garce, cette liqueur verte ! Commença-t-il.

« Une sensation de brûlure acide et creuse qui donne de l’air à la morsure encore vive, ou plutôt devrais-je dire à la boite à morsures. Hé toi, au chapeau bugne, viens donc boire une chopine et ressert toi à chaque opération mentale. Exacerbations, chiens stellaires et ressorts les plus actifs de l’esprit, nous sommes tous contre toi, serrés les uns aux autres pour cette harcelante causette ! Réjouis-toi avec nous, au fond de cette cave et rapidement tu comprendras pourquoi tes yeux, hachoirs réfrigérés, se sont décochonés de l’intérieur. Ah ! La belle rupture appliquée ! Dans ton crâne ! Dans tes os qui pourrissent à chaque coup de marteau ! Tu seras le dieu du vertige mouvant ! Ce ne sera pas de refus de redescendre une nouvelle fois en haut ! Nous t’attendons. »

Il avait fini sa tirade et il repartit aussitôt à l’intérieur de la Boite à Morsures. Paul décida alors de le suivre. La titillation insistante de ce Buvanvin avait fait naître en lui milles idées contradictoires mais il était trop curieux de voir comment cette chopine allait le transformer.

A peine avait-il touché la poignée de la porte qu’il fut happé par une éblouissante lumière, des femmes avec des têtes de cerfs, complètement nue, et les seins résolument pointés vers lui, l’invitèrent dans une danse enfiévrée. Au centre et sur un trône immense, un nain, donnait la mesure. Il était couronné de guie et, à chaque secousse sur le tambour, il hurlait à se déformer la mâchoire… ça ressemblait à une danse tribale mais il y avait aussi un piano désaccordé qui jouait Les Sonates de Beethoven. Des couleurs aromatiques encerclèrent alors Paul et le féerique ballet se dispersa.