Le labeur et l'argent du beurre. (Chronicle)

Le labeur et l'argent du beure. (Chronicle)


Dédé: Salut les gonzesses. C'est Dédé.

Dédé: Le labeur et l'argent du beurre.

Dédé: Ca y est, j'ai repris l'boulot. Après les vacances forcées qui nous avaient été offertes à Papy et moi j'suis rentré à Paname tout nu - j'avais plus un rond - et pas tout bronzé vu qu'on avait passé nos journées entre la case en dur et le bar à tapas où on s'est gavé de saloperies bien grasses arrosées de sangria pas fraiche. Y qu'la nuit qu'on sortait pour aller faire chier les G.O. au karaoké. Putain c'qu'on a pu les massacrer leurs soirées bien propres sur elles avec des chansons ringardes qu'tout l'monde reprenait en chœur. Faut dire qu'ils les avaient bien apprises, elles étaient placardées sur tous les murs du bistro. Du sol au plafond. Et pas question d'chanter autre chose sinon les G.O y gueulaient comme c'est pas permis. Ah ben avec nous y z'ont gueulé comme c'est pas permis. Y z'ont même fini par nous foutre à la porte. Même des potes à nous y z'ont foutu à la porte. Y paraît qu'on faisait désordre dans leur p'tite communauté bien ordonnée et qu'on foutait l'bordel à chanter qu'des paillardes. Faut dire qu'nos paillardes à nous elles étaient pas en odeur de sainteté chez les patrons du club. Pleines de gros mots à pas mettre dans toutes les oreilles.

Dédé: Enfin bref, y z'ont pas aimé. Même qui z'ont d'mandé à tous ceux qui chantaient leurs chansons à eux de nous siffler. Personne à sifflé r'marquez, à part les patrons du club qu'ont quand même fait comme si tout l'monde avait sifflé. On a même pas eu l'droit d'boire un coup le dernier jour. Y z'ont fermé l'bar à cause du bordel qu'on y a foutu avec nos potes qu'y z'ont dit. Y paraît qu'Papy, moi et nos potes on leur avait tout cassé et tellement salopé qu'y z'ont eu besoin de tout nettoyer jusque dans l'moindre recoin pour effacer les traces de not' passage et faire des grands travaux pour remettre en état avant réouverture. C'est vous dire si y sont ingrats pasque'on leur avait quand même mis d'l'ambiance dans leur bistro. Sans nous leurs soirées elles étaient plutôt du genre veillées funèbres.

Dédé: Tout ça pour vous dire qu'on est rentrés tout nus et pas bronzés. On a bien tenté d'foutre la main au cul de deux ou trois gonzesses mais même ça c'était interdit, on aurait pu prendre des baffes, c'est vous dire si c'étaient pas des marrants. C'est pas qu'ça nous aurait dérangé d'prendre des baffes, ça aurait déclenché une bonne bagarre comme on les aime, on aurait pu piquer la caisse au passage et rentrer les poches pleines, mais même pas.

Dédé: Donc me voilà rentré à Paname. J'ai r'trouvé M'man et P'pa, Papy est retourné dans sa cambrousse. Alors pour m'changer les idées j'suis r'tourné voir mes potes à Pigalle. Ca a pas changé Pigalle. Toujours des gonzesses sur les trottoirs et dans les bistrots. Toujours des mecs un peu gênés pour les mater d'un œil en coin concupiscent plutôt qu'de les embarquer et les tripoter devant une boutanche à cinq cents euros. Toujours des flics qui s'voient gros comme des maisons dans les clandés, pourtant dans les clandés c'est pas facile de faire entrer une maison. Toujours des bobos décorés comme des arbres de noël qui viennent s'encanailler et jouer à se faire peur, mais pas trop. Toujours des ivrognes avachis sur les comptoirs qui pleurent dans leur bière sur les femmes qui les ont quittés. Et toujours des cons qui s'prennent pour le nombril du monde en marchant fiers comme Artaban et baissent les yeux quand une gonzesse leur propose la botte en même temps que leur meilleur souvenir d'la capitale.

Dédé: Y sont sympa mes potes. Y z'ont tenu ma boutique pendant mes vacances. Enfin, j'dis ma boutique mais on partage l'activité avec mon grand frère. Ouais, j'vous en ai jamais parlé d'mon grand frère les gonzesses mais j'en ai un. Un vieil ours polaire tout avachi. Avec un nom à coucher dehors, Nounours. Vous imaginez. Vous vous appelleriez Nounours vous ? Il a passé tout son été à roupiller sur le canapé de M'man. Il appelle ça une estivernation. Complètement à côté d'ses pompes le vieux. Heureusement qu'Papy il est pas comme ça.

Dédé: Donc mes potes ont gardé la boutique pendant mon absence. Heureusement pasque le frangin ça lui a pris l'hiver dernier de transformer mon clandé en salon de thé où y fait des macarons au Pineau. Pour les vieilles qu'y dit. C'est vrai qu'ça rapporte un peu d'pognon entre 15h et 17h mais quand même, pas de quoi remplacer une bonne partie d'poker avec deux ou trois caves et quelques gonzesses pour les rincer en s'faisant rincer.

Dédé: Bon, faut pas qu'j'lui jette trop la pierre. Ca donne une image respectable au tripot, et ça la dessus qu'on paient les impôts et autres conneries qu'l'état vient chercher dans nos poches pasqu'il est infoutu d'faire du pognon tout seul. C'est toujours ça de pris. Et puis ça m'permet d'piquer dans la caisse c'que les vieilles y laissent. Avec ça j'alimente la pompe des parties avec deux ou trois d'mes potes qui font les larrons face aux pecnots qui viennent nous apprendre à jouer avec condescendance et pas deux sous d'connaissance du jeu mais les poches pleines. Aussi pleines qu'leur tête est vide et qu'mes potes en fin d'soirée.

Dédé: Le salon de thé de Nounours c'est la partie visible de l'iceberg. Le gros des glaçons il est en-d'sous, entre l'heure de l'apéro et la fermeture, dans les seaux à Champagne et les verres de Whisky. Nounours c'est un légétimiste, j'aurais du l'emmener avec moi pendant mes vacances, il aurait embrouillé les G.O. surtout qu'lui il en connaît pas des paillardes. J'lui aurais d'mandé de chanter à l'unisson du chœur des vierges ça aurait p't'être arrangé nos affaires à Papy et moi. Et celles de mes potes par la même occasion. Enfin, c'est pas sûr quand même pasque Nounours des fois y peut ne pas être fin aussi. Et dans ces cas là vaut mieux pas la ram'ner. J'en sais quelque chose, une fois j'lui ai tiré sa carte bleue, depuis y veut plus m'avancer d'pognon. Faut dire qu'j'avais passé la nuit à Pigalle chez la concurrence et qu'y m'ont pas fait d'cadeaux. Même les gonzesses elles ont tiré sur la carte bleue à Nounours, j'vous raconte pas l'état d'son compte le lend'main. Oh putain, il a gueulé, mais il a gueulé ! Faut dire qu'il a été élevé par M'man. Et que M'man quand elle fait la tronche c'est pas la gueule enfarinée. Si vous m'croyez pas vous aurez qu'à demander à P'pa quand vous l'verrez.

Dédé: Donc Nounours quand il estiverne pas y fait des macarons au rez-de-chaussée du clandé, avec des napperons sur les tables et des p'tites serviettes brodées pour les vieilles qu'essuient les traces de beurre sur leurs lèvres. Il en fait pas cadeau d'ses macarons. Enfin, faut bien distraire les vieilles pendant qu'leurs vieux y vont mater les gonzesses au peep-show. Et y pas d'raison qu'y soient seuls à s'faire ruiner pour rien, même pas toucher. Les vieilles au moins elles se mettent quelque chose dans la bouche. Alors après elles s'essuient avec les p'tites serviettes brodées de Nounours. Faut dire qu'la qualité du service ça permet de vendre plus cher. Y s'prive pas de vendre cher Nounours, avec le prix d'un macaron chez lui vous pouvez vous payer un gâteau d'anniversaire pour douze chez Lenôtre. J'vous dis pas comment y s'gave !

Dédé: Toujours est-il que ça m'emmerde un peu c't'histoire de salon de thé pasque j'peux plus emmener les potes dans l'après-midi, on est obligé de traîner ailleurs. On va au Lux Bar souvent mais y a moins d'gonzesses que du temps d'Papy. On y va pour lui faire plaisir à Papy pasqu'après je lui raconte, ça lui rappelle sa jeunesse.
Mes potes quand j'suis pas là et qu'Nounours roupille y surveillent la boutique. Heureusement qu'y sont là pasque j'vous raconte pas c'qu'y a comme envieux et comme grincheux qui nous la mettraient volontiers à sac la boutique, rien qu'pour nous casser les couilles. Si encore y z'avaient envie d'la casser pour prendre not' place, mais même pas, c'est juste pour faire chier. On s'rait obligé après d'fermer plusieurs jours, de faire un grand ménage jusque dans les coins et d'engager des grands travaux d'rénovation après sans même être certains d'retrouver tous nos clients. Pasque vous savez c'que c'est. Vous restez fermés trois jours et les meilleurs clients y s'tirent ailleurs, à la concurrence. Allez les rattraper après.

Dédé: Bon, on a pas à s'plaindre avec Nounours, ça marche bien notre affaire. Y fait ses macarons au rez-de-chaussée dans la journée. J'lui vide sa caisse avant l'apéro, j'ouvre le clandé avec mes potes. On s'marre bien. Nounours y bosse nous on dépense le pognon. Havane, Champagne, gonzesses. Papy y préfère venir le soir. Les macarons au Pineau c'est pas son truc. Trop gras qu'y dit. Et puis l'Pineau, même s'il aime pas trop ça il le préfère dans un verre que mélangé à du beurre. Moi aussi.

Dédé: C'est pas qu'on s'est vraiment ennuyés pendant nos vacances avec Papy mais on est quand même bien contents d'être rentrés chez nous. Reprendre le boulot, même si y nous fatigue pas trop (on travaille guère plus que des fonctionnaires en RTT). C'qui est le plus prenant c'est les responsabilités vis-à-vis des gonzesses. Faut les protéger des malveillants et c'est pas c'qui manque autour de nous. Tiens, rien qu'les vieux qui accompagnent leur vieilles au salon de thé l'après-midi avant d'aller au peep-show y reluqueraient bien sur les nôtres pendant qu'elles font l'service et sans leur filer un rond. Elles ont besoin d'se faire du pognon les petites, faut chasser les vieux comme des mouches et leur dire de r'venir le soir. Y en a qui r'viennent. Mais pas tous, leur vielle doit les enfermer à la maison après une certaine heure. Précisément à l'heure où les serveuses descendent au clandé après avoir troqué leur fringues de souillons boutonnées jusqu'au col contre des jupes fendues jusqu'à la foufoune. Faut dire qu'on ramasse plus de pognon dans une jupe fendue qu'dans un chemisier d'où rien ne dépasse.

Dédé: En fait dans notre affaire y a le labeur et l'argent du beurre. Le premier c'est Nounours qui s'en charge et moi j'm'occupe du reste.

Ciao les gonzesses, c'était Dédé.